Wednesday, December 31, 2008

Des mauvaises stratégies du Hamas aux leçons apprises par Israël

Cyberpresse

Mercredi 31 décembre 2008
LE SOLEIL - Point de vue

Des mauvaises stratégies du Hamas
aux leçons apprises par Israël

Rien ne va plus… au Proche-Orient! À quelques jours de l’inauguration de la nouvelle Administration américaine, les principaux acteurs arabes semblaient dans l’attente d’un signe en provenance de Washington pour ajuster leur « tirs » en adoptant des nouvelles mesures plus souples ou plus dures! Or, voilà que le camp des durs semble avoir pris de l’avance sur le camp de la paix en créant une crise sans précédent dans la Bande de Gaza.

En effet, après six mois de calme relatif dû à une trêve entre le Hamas et l’État hébreu, la situation explose de plus belle brisant avec elle une entrée « obamayenne » calme. C’est principalement le discours officiel des dirigeants du Hamas annonçant la fin de la trêve avec Israël qui est la source première de cette crise. La première salve de roquettes Al-Qassam et de Katioucha étaient l’étincelle qui a mis le feu à la poudre. Cette explosion de la violence n’est pas innocente dans le sens qu’elle réponde à une stratégie presqu’annoncée de part comme de l’autre.

Les enjeux pour le Hamas

En effet, pour le Hamas, il s’agit avant tout de miser sur une similarité du résultat obtenue par le Hezbollah qui avait fait face à l’armée israélienne en 2006 au Liban. Une action, faut-il le rappeler, qui a été lancée par le mouvement chiite libanais principalement pour soulager le Hamas aux prises avec la pression de Tsahal pour libérer le soldat Guilad Chalit. La confrontation alors avait duré 33 jours et abouti en fin de compte à une victoire médiatique sans précédent du Hezbollah qui a réussi « une victoire divine » comme l’avait annoncé son chef, Sayyed Hassan Nasrallah. Un discours qui a transcendé la frontière libanaise pour envahir l’ensemble de la rue arabe mettant ainsi dans l’embarras nombre des régimes de ces pays.

Ainsi, le Hamas, chercherait à créer des conditions similaires, quitte à provoquer une réaction en chaîne dans la rue arabe, qui, à son tour, exercerait des pressions sur leurs régimes respectifs. Cela se traduirait par une mobilisation de ces derniers contre la nouvelle administration américaine déjà condamnée d’avance. Cela s’explique principalement par la déception affichée des leaders arabes après la nomination de Rahm Emanuel comme chef de Cabinet du futur Président Barak Obama! Le mythe du Président « musulman » américain et ami de la cause arabe était alors tombé en flèche.

La stratégie du Hamas serait alors celle de causer une instabilité continue en territoire israélien comme il avait l’habitude de faire en attendant de mieux comprendre et analyser la politique de l’équipe Obama une fois au pouvoir. Or, ce que le Hamas a manqué d’analyser, c’est avant tout l’espace temps qu’il a choisi pour appliquer sa stratégie et qui ne convient plus à Tel-Aviv.

Les enjeux israéliens

En effet, Israël a appris la leçon de la guerre de juillet 2006 et cherche à réparer cette erreur qui lui a coûté son image de dissuasion dans la rue arabe, surtout dans un temps où l’Iran se fait de plus en plus menaçant pour les intérêts aussi bien américains qu’israéliens dans la région.

Ainsi, le mythe brisé en 2006 par les images de tanks ultrasophistiqués détruits par un armement soviétique dernier cri et iranien utilisé par les miliciens du Hezbollah devait être changé car il y va de la survie de l’État d’Israël. Cela est d’autant plus vrai que les attaques du Hamas utilisant des roquettes artisanales Al-Qassam se transformaient chaque jour en des attaques utilisant un armement de plus en plus sophistiqué de fabrication étrangère! Des munitions, des mortiers, des missiles Katioucha de fabrication soviétique se mêlaient à des vivres et transitaient par les tunnels creusés par les combattants du Hamas entre l’Égypte et Gaza.

Cette situation ne pouvait durer plus longtemps car chaque jour le nombre de victimes civiles israéliennes augmentait au même rythme que les roquettes et mortiers du Hamas! À cela s’ajoute la détermination du gouvernement actuel de démontrer qu’il est encore capable de gérer une crise et diriger une guerre similaire dans certains aspects à celle de 2006 sans pour autant y laisser des plumes.

C’est ainsi que la stratégie israélienne basée sur une préparation préemptive enrichie de l’expérience libanaise, menée à l’époque d’une façon spontanée et presque chevaleresque, a poussé l’armée israélienne à considérer des mesures qui lui ont permis de lancer aussitôt les premiers missiles palestiniens se sont abattus sur les villes israéliennes une attaque à grande échelle visant les centres et quartiers généraux du Hamas.

2006 – 2008, la différence dans l’action!

Aujourd’hui, cette tactique et stratégie israélienne ressemble presque comme deux gouttes d’eau à la stratégie adoptée durant la Seconde guerre du Liban contre le Hezbollah, mais avec deux différences majeures. La première se situe au niveau de la préparation de l’armée israélienne qui était prête à l’action aussitôt l’ordre lui a été intimé. Son attaque tous azimut a ciblé l’ensemble des régions où se situait le Hamas, alors que dans le cas du Hezbollah, cela s’était fait par étape, ce qui a permis aux dirigeants du parti chiite pro-iranien de se terrer. La seconde, c’est la préparation pour une invasion terrestre de grande envergure pour déloger le restants des miliciens du Hamas et qui semble être mis en marche. Ce qui n’était pas le cas au Liban puisque c’était uniquement des réservistes mal équipés qui avaient mené la première attaque contre le Hezbollah. Alors que dans le cas du Hamas, les réservistes viendraient appuyer les troupes d’élites et leur nombre se compte par milliers!

Le but ultime

Cette dernière crise, ouvre grand la boîte de pandore car le Hezbollah, l’Iran et la Syrie peuvent orchestrer de nouvelles stratégies avec l’appui d’une opinion publique arabe en furie contre Israël et les États-Unis. La région en entier peut écoper et dégénérer en une guerre régionale, à moins que ces acteurs arabes ne soient approchés par Washington, Moscou ou d’autres puissances pour les ramener à reconsidérer leurs positions d’une part comme de l’autre.

En attendant, ce qui se joue actuellement, c’est l’avenir du Hamas et la possibilité réelle pour Mahmoud Abbass de refaire son entrée dans Gaza, quitte à reprendre le dialogue plus tard avec Israël pour espérer enfin avancer les pourparlers de paix. Si tel serait le cas, cette attaque servirait également d’un message aussi bien à l’Iran qu’au Hezbollah dans un temps où Damas semble avoir brisé la glace avec Tel-Aviv!

Alain-Michel Ayache
Spécialiste du Proche et Moyen-Orient
Département de Science politique
Université du Québec à Montréal (UQÀM)
Concordia University

Saturday, December 6, 2008

L'avocat du «Diable»


L'avocat du «Diable»
Alain-Michel Ayache

Après Maher Arar, c’est au tour de trois autres musulmans… canadiens, Ahmad el-Maati, Muayyed Nureddin et Abdullah Almalki de réclamer des dommages et intérêts au gouvernement du Canada pour des crimes commis contre leurs personnes par des pays dont ils sont originaires, tel la Syrie et l’Égypte. Ce qui est regrettable, c’est que le contribuable canadien se voit désormais obligé de payer la facture à la place des dictatures du Proche et du Moyen-Orient, tout cela à cause d’un précédent créé par l’affaire Arar!

En effet, la décision du gouvernement canadien de payer des dommages et intérêts à Maher Arar pour avoir été « torturé » par les services de renseignements syriens, à cause de « fausses informations » adressées par la GRC et par le SCRS aux autorités américaines, n’a fait qu’ouvrir une boîte de pandore pour ce genre de situation. Le problème ne réside pas dans la volonté du gouvernement d’apporter une certaine aide à ces « victimes », mais surtout dans la façon dont le système aborde lesdits problèmes.

Ce qu’il faut savoir

D’ailleurs, aussi polémique que ce qui suit sera, la vérité reste toujours vague, compte tenue des informations qui circulent dans le milieu arabe à Montréal. Je m’explique :

Selon des observateurs de la scène politique arabe, et non des moindres, qui habitent la France et qui sont de fins critiques du gouvernement syrien, M. Arar serait membre des Frères musulmans. Or, ces derniers sont bannis par les autorités syriennes contrôlées par une minorité alaouite (secte issue du chiisme) à laquelle appartient l’actuel président syrien, Bachar Assad. Le père de ce dernier avait détruit deux villes en 1982, Hama et Homs, par l’aviation syrienne et causé plusieurs dizaines de milliers de morts, ceci pour mettre fin aux actions et aux tentatives de putsch que les Frères musulmans (sunnites) fomentaient contre lui et son régime dirigé par une main de fer alaouite.

Depuis l’invasion de l’Irak par les Américains, mais surtout depuis l’évacuation humiliante des troupes d’occupation syriennes du Liban sous le poids de la colère populaire libanaise, de même que dans le cadre d’un jeu de passe-passe pour gagner les faveurs américaines ou pour monnayer quelques stratégies régionales, le régime Assad (fils) multiplie les efforts de déstabilisation de la rue arabe, notamment l’irakienne. Sa méthode la plus rusée consiste à encourager les combattants sunnites des Frères musulmans et ceux d’Al-Qaïda à partir se battre en Irak contre les alliés (notamment les Américains), plutôt que de diriger leurs attaques contre le régime des Assad. Car il faut comprendre que la majorité en Syrie est sunnite et non alaouite. La dernière ne représente que 5% de la population syrienne ; pourtant, ce sont les sbires d’Assad qui, depuis plus de 40 ans, dirigent le pays d’une main de fer !

Le résultat d’un tel machiavélisme est, bien entendu, l’affrontement politique avec Washington. Or, depuis que l’Iran occupe de plus en plus de place sur la scène régionale, Damas multiplie les tractations pour regagner sa place de joueur principal dans la région, notamment suite à la dislocation du régime-frère baassiste de Saddam Hussein.

Comment s’y prendre?

La méthode la plus intéressante que Damas a trouvée consiste avant tout à continuer de jouer les uns contre les autres et de se positionner comme intermédiaire ou comme pourvoyeur de solutions. C’est dans cette optique qu’il faut analyser l’affaire Arar. En effet, selon les observateurs du monde arabe en question, Arar fait partie des Frères musulmans. Or, ce sont ces mêmes Frères musulmans qui envoient leurs Jihadistes se faire exploser en Irak contre les Américains et leurs alliés irakiens et occidentaux. De plus, il semblerait que des proches d’Arar cherchent à vendre la mèche selon laquelle il se serait réellement déplacé en Afghanistan pour des raisons louches. Le problème, c’est que ces derniers refuseraient de parler tant qu’une bonne somme d’argent ne leur aurait été pas versée !

En d’autres termes, et sans vouloir accuser M. Arar de quoi que ce soit, le geste du gouvernement fédéral de payer une personne pour des erreurs commises par un autre pays a ouvert la porte à d’autres demandes similaires. Car la GRC et le SCRS n’avaient pas de fausses informations en tant que tel, puisque les Frères musulmans sont bel et biens un groupement de fanatiques musulmans et recrutent des Jihadistes pour se battre contre l’Occident. Si l’on part du principe que l’information qui leur a été transmise et selon laquelle M. Arar appartenait aux Frères musulmans, donc, et conformément à la Convention de sécurité signée entre le Canada et les USA après les événements du 11 septembre 2001, les institutions de sécurité du Canada n’ont pas commis d’erreur ! Si erreur il y eut, c’était davantage celle des États-Unis d’Amérique, car M. Arar aurait dû être renvoyé au Canada, qui est officiellement son pays, plutôt qu’en Syrie. D’où la question principale : À qui a servi le « crime » ?

Un précédent dangereux

Ainsi, le dédommagement financier de M. Arar, bien qu’il soit humainement justifiable pour certains, procure des munitions à tous ceux qui voudraient réclamer des sommes d’argent du gouvernement fédéral en tant que dédommagement pour avoir subi des préjudices dans leurs pays d’origine ! En quelque sorte, voici une sorte d’une loterie inespérée qui est mise à la disposition des plus zélés ! Or, ceci n’est qu’une preuve concrète de la faiblesse de nos institutions, qui se laissent intimider par des personnes qui profitent largement du système.

Ce dont le Canada a besoin, c’est de répondre rapidement aux appels de ses citoyens en détresse dans leurs pays d’origine. Selon les lois de ces pays, souvent dirigés par des dictateurs sanguinaires assoiffés de pouvoir et d’argent, toute personne née ou de descendance de parents originaires du pays en question, (ex. Syrie, Égypte, etc.), est considérée « native » du pays dès lors qu’elle se trouve sur son territoire. La nationalité canadienne ne sert alors à rien et n’accorde aucun privilège à son détenteur. D’ailleurs, de nombreux cas similaires ont déjà été signalés dans plusieurs pays, où le passeport canadien n’a pas servi à grand chose d’autre qu’à être encore plus torturé et accusé d’espionnage pour le compte des … Américains ou des Israéliens.

Aujourd’hui, nous voilà donc, encore une fois, aux prises avec trois nouvelles personnes qui défient le gouvernement et lui demandent réparation pour des crimes commis par d’autres pays. Pour peu, l’on va finir par croire que les services de sécurité canadiens ne servent plus à rien autre que de diffuser des mensonges et de provoquer la torture par régimes interposés !

Malheureusement, une telle politique de « naïveté » peut entraîner des conséquences néfastes sur nos services, à une époque où le terrorisme est dormant à l’intérieur de nos frontières et n’attend que le bon moment, celui de la faiblesse de nos institutions, pour activer ses cellules.

Faut-il vraiment, au nom de l’humanitarisme, être laxiste au point de laisser des zélés usurper le système ? Faudrait-il purger nos institutions de sécurité pour les rendre plus efficaces et capables de mieux cerner le vrai du faux ? Sommes-nous devenus peureux au point de nous priver de dire les choses comme elles sont, sans crainte de provoquer un soulèvement des médias au nom des « droits de la personne » ? Or, ce sur dernier point précisément, je crains que cela ne soit déjà peine perdue car, à y regarder de plus près, on peut sérieusement se demander quand s’imposera les changements à la Constitution canadienne afin qu’elle devienne plus appropriée aux détracteurs de notre société. Seul une politique « clairvoyante », efficace et rigoureuse pourrait stabiliser et remettre sur pieds nos institutions de sécurité. C’est justement là tout le défi du nouveau ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan.

Thursday, November 13, 2008

Les défis d'Obama





Les défis d'Obama
Alain-Michel Ayache

Il y a encore quelques mois, l’idée d’avoir un homme de race noire comme président des États-Unis était en soi un défi, d’autant plus que dans l’imaginaire populaire de l’Occident, l’Amérique était encore une entité où le racisme était plus vivace qu’en Europe. Or, voilà qu’aujourd’hui, les États-Unis d’Amérique prouvent encore une fois la grandeur de ce pays et la force de sa démocratie; de quoi constituer une leçon d’ouverture au monde entier.

Mais qu’en est-il exactement?

À priori, l’élection de Barack Obama représente un ras-le-bol des citoyens de ce pays de la politique du président sortant Georges W. Bush, dont les sondages ont souligné durant les élections la dégringolade sans précédent de sa popularité. Or, bien que Bush soit pointé du doigt pour ce que nombreux désignent comme son incompétence à gérer une crise, il n’en demeure pas moins que l’élection d’Obama n’a pas rassembler pour autant une majorité absolue des Américains. Ces derniers demeurent divisés entre supporters d’une Amérique chrétienne conservatrice et républicaine et une autre progressiste et démocrate. De même, l’arrivée d’Obama au pouvoir ne signifie aucunement que le camp progressiste et démocrate ait obtenu l’aval de toute la population pour mener ce « changement » tellement surligné durant la campagne dans la direction souhaitée. D’ailleurs, implanter un changement drastique sur fond de grave récession économique ne peut se faire sans des politiques internes impliquant une nouvelle manière d’imposition en faveur des masses et au détriment des capitaux!

Les défis d’Obama

D’où le premier des défis majeurs d’Obama, celui de convaincre la société américaine de changer de cap dans sa façon de penser le sociétal versus l’économique. Ainsi, d’une nation basée sur le libéralisme économique, ou pour certain, le capitalisme sauvage, Obama semble vouloir instaurer une sorte d’un pont vers un libéralisme participatif, menant à terme vers une sorte de socialisation de la société américaine. De quoi apporté un plus pour les plus démunis – certains diront également pour la classe moyenne – au détriment des plus nantis. L’intervention étatique entamée par Bush pour sauver de la faillite de grandes institutions financières et d’assurances de renom serait parmi les prémices d’une telle politique qu’Obama voudrait mener encore plus loin…

Le second des défis se situe au niveau de la politique internationale des États-Unis et de l’image que projettera Obama de son Administration. Or, là, plusieurs problèmes se pointent déjà à l’horizon avant même qu’il n’entre à la Maison Blanche.

Le premier problème n’est autre que le calendrier de retrait des troupes américaines d’Irak. Or, la difficulté d’une telle décision ne réside pas dans le retrait en soi, mais plus dans le message convié à travers un retrait hâtif et rapide des troupes, même si pour Obama, ce retrait sera compensé par un redéploiement en Afghanistan. Car, ce qu’il faut comprendre c’est que les pays largement responsable de l’instabilité en Irak, la Syrie et l’Iran, feront tout pour se le répartir en zones d’influences, ce qui risque d’affecter la stabilité régionale et l’économie pétrolière.
En effet, Damas encourage les insurgés sunnites dont les Frères musulmans et certains membres d’Al-Qaeda à continuer les opérations-suicides contre les Marines, alors que Téhéran soutienne et arme les Chiites irakiens pour maintenir l’Irak sous leur hégémonie maintenant que le pouvoir appartient à la majorité chiite !

Le second problème pour l’Administration Obama n’est autre que l’éternel conflit au Proche-Orient entre Israéliens et Palestiniens. Or, tout au long de la campagne, Obama avait donné des signes positifs pour un dialogue d’ouverture avec « l’ennemi », iranien était-il ou syrien. Son ouverture sur l’autre avait créé un espoir chez les Arabes de voir une politique « plus équilibrée » d’autant plus que pour beaucoup de Musulmans, Obama était considéré comme l’un des leurs de par les origines de son père ! Sauf qu’avec son choix de Rahm Emanuel comme Secrétaire général de la Maison Blanche, Obama a involontairement renversé les attentes du monde arabe! En effet, les origines israéliennes de « Rahmbo » comme surnommé, sont suffisantes pour provoquer l’ire des Arabes et une animosité contre le personnage du président. Ce qui ne manque pas d’aggraver la haine anti-américaine, accouchant par le fait même d’une quasi « fatwa » des islamistes les plus radicaux contre la personne du président élu et pour cause : pour les plus intégristes, le fait qu’il soit de père musulman, fait de lui obligatoirement un musulman. Mais, le fait qu’il ait choisi la religion chrétienne fait de lui de facto un apostat et donc le tuer serait un devoir!

Le troisième problème pour Obama sera celui de rassembler les Américains que les sondages prouvent divisés plus que jamais. Or, sa tâche ne sera pas facile d’autant plus que dans les régions Sud traditionnellement conservatrices, il est inacceptable d’avoir un noir à la présidence du pays. Cela ne manquera sans doute pas de soulever la colère des plus radicaux dont les « Red Necks » parmi les Américains du Sud dont les ancêtres pratiquaient l’esclavage. À cela s’ajoute les groupuscules racistes comme les KKK et les néo-nazis qui seront sans aucun doute tentés d’attenter à la vie du président élu.

Ainsi, l’arrivée à la Maison Blanche de Barack Obama représente en soi un grand défi aussi bien à la personne du Président élu, mais surtout au peuple États-Uniens. Ce qu’il faut au nouveau président, c’est avant tout la chance de prouver que son idée de changement peut être bénéfique à toute l’Amérique et non seulement à une partie de la société aussi majoritaire soit-elle. Or, dans un monde où l’argent contrôle les destinées des peuples, l’on est en droit de se questionner si à l’instar de JFK, Obama représenterait une nouvelle Amérique! Une Amérique dont le rêve vient de se concrétiser après tant d’années d’espoir! Mais la question demeure : pourrons-nous enfin passer outre nos différences raciale et ethnique pour pousser de l’avant l’humanité vers de nouveaux horizons, là où le pouvoir de l’argent servira plus l’Homme plutôt que l’inverse? La réponse officielle d’Obama est « YES WE CAN! » Reste à savoir si la réalité et le destin lui donneraient raison.

Thursday, October 16, 2008

Trois Aspects!






Trois Aspects!

Alain-Michel Ayache


Au moment où j’écris ces mots, le résultat des élections fédérales demeure encore inconnu bien que la plupart des sondages penche du côté des Conservateurs pour un second mandat minoritaire.

Toutefois, le présent article n’est pas pour commenter le résultat encore moins l’analyser, mais plus pour souligner quelques aspects particuliers de ces élections, notamment en ce qui a trait au Québec et au Canada. En effet, tout au long de cette campagne, les médias n’ont pas cessé de décrire le Québec comme le principal terrain de ‘bataille’ entre les Conservateurs, les Libéraux et les Blocquistes et pour cause : Que ce soit Harper, Dion ou même Duceppe, l’enjeu tournait autour de la notion de la « Nation » québécoise et de la place du Québec au sein du Canada ou même au sein du gouvernement, et donc, une sorte d’un accès au pouvoir, un peu peut-être à l’image du Conseil de Sécurité! Enfin, presque!

Un débat qui limite les perspectives…

Ce qui me conduit à ma première question : Si le débat actuel se limite toujours à celui de la nation québécoise versus le Canada anglais, qu’en est-il des autres francophones à travers le Canada? N’ont-ils pas droit au chapitre de la décision de leur avenir également ou tout simplement de leur appartenance ou non à cette « Nation »? Que ce soit les Acadiens ou les Franco-Ontariens ou ceux qui habitent les autres provinces et territoires du Canada, la décision de souscrire à la définition du Premier Ministre sortant (entrant), celle de considérer le Québec comme étant une nation au sein du Canada, n’est pas nécessairement approuvée par l’ensemble de la population francophone, d’autant plus que si l’on parte du principe que le Canada ait été fondé par les deux nations européennes, française et britannique et les Autochtones qui y habitaient le territoires, les descendants de ces populations qui se seraient dispersées à travers le Canada actuel détiennent théoriquement toujours le droit de réclamer leur appartenance à ces peuples fondateurs et donc prétendraient que la nation « canadienne » est également francophone. En d’autres termes, pourquoi pénaliser les autres francophones du Canada pour satisfaire uniquement une partie même majoritaire en limitant l’appartenance du la nation francophone à la seule notion québécoise?

Et les autres?

À cela s’ajoute également les autres « Québécois » et « Franco-Canadiens » dont en fait, l’immigration au Canada est très récente. Ces derniers, n’étant pas nécessairement de descendances européennes, mais proviennent d’anciennes colonies ou protectorats français et chérissent, si non plus, la langue de Molière que les Québécois eux-mêmes! D’ailleurs, s’ils ont choisi le Canada et le Québec surtout, c’est principalement à cause du fait français. Alors, que dire d’eux? Ont-ils droit au chapitre du choix entre la notion de la « Nation » et son identité « québécoise » ou « canadienne »?

Ce qui est pour le moins stressant pour ces populations, notamment en temps d’élections, c’est que les politiciens leur font appel et les qualifient de ‘Québécois’ ou de ‘Canadiens’ à part entière, alors qu’en réalité, la majorité d’entre eux a du mal à se faire accepter en tant qu’égale des « Québécois de souche » ou même des autres citoyens du pays! Ce ne sont pas les exemples qui manquent… notamment en matière d’intégration au travail!

Ce qui m’emmène à ma seconde question : Quelles sont leurs orientations politiques et Comment voteraient-ils durant les élections?

Le choix des « immigrants »!

C’est sans doute la question principale que les chefs des partis politiques se sont posés ces derniers jours… et pour cause, le vote ethnique, aussi étrange que cela puisse paraître, est d’une importance majeure, malgré le fait que les politiciens ne semblent – du moins pour la plupart – intéressés par le prendre au sérieux. À part l’équipe Harper et le NPD, les autres chefs des partis semblent avoir pris pour acquis le vote ethnique, chacun à travers sa vision de l’importance à accorder ou non à telle ou telle communauté. Le problème, c’est que généralement, les communautés culturelles et notamment celles dont la majorité est constituée de personnes de la première génération, c’est-à-dire des personnes qui sont nées à l’étranger et se sont établies par la suite au Canada, examinent avant tout la politique étrangère du gouvernement avant de décider pour qui voter. C’est le cas du moins des communautés issues du Proche et Moyen-Orient, où le vote est traditionnellement orienté du côté des Libéraux. Ces dernières se sont – du moins selon les rumeurs qui circulent – détachées des slogans libéraux pour aller voter pour Harper – pour celles parmi elles qui ont vu en la politique étrangère du présent gouvernement un salut pour leur cause, notamment les Chrétiens du Proche et Moyen-Orient et une bonne partie des communauté juives, notamment les Sépharades – et pour le NPD de Layton pour celles qui ne croyaient plus au message des Libéraux pour qui elles votaient traditionnellement – principalement les communautés musulmanes moyen-orientales et nord-africaines.

Ainsi, l’on se demande après tout si les candidats choisis par les différents partis politiques et qui proviennent de communautés culturelles sont véritablement représentatives de la volonté des leurs! Un examen des résultats donnerait à priori un début de réponse à cette question. Ce qui nous pousse à croire qu’une étude scientifique est sérieusement nécessaire pour comprendre l’apport de ces communautés dans une prochaine élection, fédérale soit-elle ou provinciale, d’autant plus que selon les chiffres à notre disposition, un Montréalais sur quatre est né à l’étranger. Un pourcentage qui avoisine les 40% en Ontario et les 60% à Vancouver!

Ce qui me pousse à poser ma dernière question pour cet article : Pourquoi les élections tournent autour du seul chef comme si les autres candidats n’existaient pas?

Au-delà du charisme du seul « Chef »…

En effet, toute la campagne électorale était principalement basée sur le « Chef », comme si les autres candidats n’existaient qu’en complément! Même le programme du (des) parti (s) en tant que tel était étroitement lié à la vision du Chef. Or, nous l’avons vu, lorsque Stéphane Dion est sorti de son rôle d’unique acteur, pour permettre aux autres « chefs » du PLC de passer à l’action, le résultat n’était que plus positif. D’ailleurs, c’est grâce à l’intervention des ténors du parti libéral que les sondages sont remontés pour le PLC. Alors, faut-il vraiment baser les campagnes électorales sur la performance du chef uniquement? Qu’en est-il de ces autres candidats, pas nécessairement les ténors ou les aspirant à la chefferie, mais celles et ceux qui, malgré tout, ont ou peuvent avoir également leur mot à dire dans ce genre de campagnes, voire réussir quelquefois là où leurs chefs ont échoué, notamment lorsqu’il s’agit de rallier certaines communautés à leurs programmes… Ce qui me ramène à ma précédente question, pourquoi ne pas permettre pleinement par exemple, aux candidats issues des communautés culturelles de mener leurs propres campagnes sur des thèmes propres à leurs communautés lorsqu’il s’agit de mobiliser ces dernières pour aller voter pour le parti de leur choix? Pourquoi ne pas leur permettre d’avoir leur propre message de campagne, quelque chose qui puisse avoir un sens pour les siens au lieu d’un message copié-collé sur celui du « Chef »? D’aucuns diront que cela ne pourrait se faire car le candidat est avant tout pour toute la population de la circonscription pour laquelle il se présente. Cela est théoriquement vrai, mais qu’en est-il alors de sa communauté dont le nombre justifie une démarche particulière afin de dire enfin que ces communautés font véritablement partie de la « Nation » canadienne était-elle ou québécoise! Au moins personnaliser le message qui leur est destiné!

L’interaction, un chemin obligatoire

Aujourd’hui, et plus que jamais, l’interaction entre les différentes communautés qui constituent le Québec et le Canada est importante afin d’éviter des événements qui toucheraient à la sécurité du pays… Éviter le modèle de la banlieue parisienne (ou même celui de Montréal Nord) et bâtir le citoyen au vrai sens du terme devrait être une priorité du prochain gouvernement fédéral avec l’appui de toutes les provinces et les territoires. Le modèle « trudeauiste » du multiculturalisme doit être revu et corriger pour une meilleure harmonie entre les différentes communautés et pour qu’il y ait une appartenance pleine et entière à la notion de citoyenneté canadienne. Le second choix serait alors l’appartenance linguistique, où la notion de la « nation » serait répartie entre le Canada anglophone et le Canada francophone incluant le Québec. D’où ma dernière question à laquelle je vous demande de répondre : À quand un parti fédéral francophone dédié uniquement à la défense des intérêts des francophones à travers le Canada.

Saturday, October 4, 2008

Du machiavélisme « Assadien » renouvelé !






Du machiavélisme « Assadien » renouvelé !

Alain-Michel Ayache

À en croire les nouvelles en provenance de Damas, la voiture piégée qui a explosé le samedi 27 septembre dernier serait le travail d’un terroriste irakien lié à Al-Qaïda. Ce « terroriste-suicidaire » se serait fait exploser avec sa voiture en plein milieu de la foule dans une région dense sur le chemin de l’aéroport. Les nouvelles annoncent également que l’explosion a fait exactement 17 morts et 14 blessés, tous des civils!Or, voilà! Là où cette histoire devient un peu trop loufoque, c’est lorsqu’elle pointe du doigt des citoyens d’autres pays arabes voisins qui se seraient aventurés sur le sol syrien!

Un pays sous haute surveillance

N’importe quel spécialiste et observateur de la région du Proche-Orient en général et de la Syrie en particulier, vous dira qu’il est pratiquement impossible pour un étranger et encore moins pour un citoyen arabe de la région de rentrer aux toilettes sans qu’il ne soit sous la surveillance des services secrets syriens. Or, depuis quelques temps, une série d’assassinats ciblés semblent prendre de l’ampleur en Syrie et surtout dans la capitale, Damas. Ce qui est plus étrange, c’est que ces assassinats ciblent souvent des généraux d’état-major de l’armée syrienne et souvent des services de renseignement. Des officiers responsables de dossiers très sensibles reliés d’une manière ou d’une autre à la problématique du Hezbollah et de l’Iran du moins pour certains.

Bien entendu, le bouc-émissaire officiel est toujours Israël. Sauf pour ce dernier cas où c’est maintenant Al-Qaïda qui est officiellement pointée du doigt et pour cause.

En effet, cette explosion qui vient de secouer encore une fois le centre de Damas n’est pas sans créer des controverses. Ainsi, trois thèses se disputent les causes et la nature du message dont l’attentat serait porteur.

La version officielle

La première, qui est la version officielle, veut que cet acte ait été commis par un terroriste venu spécialement d’Irak conduisant une VUS de marque Suburban de couleur lie-de-vin et qui voulait transmettre un message aux autorités syriennes qui sont d’une part ouvertes au dialogue avec les Israéliens et de l’autre se battent contre les Sunnites par troupes interposées, entendez les alliés alaouites au Liban qui se battent contre les intégristes sunnites proche du camp Hariri. Donc, pour Damas, ce sont les Sunnites intégristes au Liban qui auraient payé ou encouragé le « terroriste sunnite irakien » de conduire jusqu’à Damas pour se faire sauter avec sa voiture emportant avec lui 17 civils. Étrange aventure lugubre! Car d’habitude dans des attentats pareils, il y a plus de blessés que de morts!

La version Chiite

La seconde version est celle qui met en relief le rapprochement entre Damas et Tel-Aviv même si cela se passe d’une manière indirecte à travers l’intermédiaire turc. Cette volonté soudaine de Damas de reprendre les pourparlers dans le but d’aboutir à des négociations en face à face avec les dirigeants israéliens et plus tard à une paix durable, serait vue d’un mauvais œil par le Hezbollah et par les Iraniens. Ces derniers auraient tenté de trouver des alliés au sein des armées syriennes, notamment parmi ceux qui n’aiment pas trop nécessairement Assad et son équipe. Cette volonté iranienne qui met en relief des promesses qui auraient été faites par Assad à Israël de mettre de sérieux bâtons dans les roues de la machine de guerre et de la logistique du Hezbollah et de l’Iran en échange d’une place de choix sur l’échiquier régional, semble être le cœur de cette thèse. Ce qui crédite également cela, c’est l’assassinat aussi bien de Imad Moghnieh, le numéro 2 dans l’échelle de commandement des miliciens du Parti de Dieu et du Général Mohamed Sleiman qui, disait-on, était l’officier de liaison avec le Hezbollah.

Aussi plausible que cela puisse paraître, et si l’on considère les informations officieuses, bien que transmises par des diplomates, que la cible réelle était un général dans l’armée syrienne du nom de Abdel-Karim Abbas, un grand point d’interrogation se pointe alors! Et pour cause : Ce général en question est impliqué dans le dossier de l’assassinat de l’ex-Premier ministre libanais, qui est Sunnite, et avait été demandé à La Haye pour témoigner de ce qu’il sait de cet attentat.

Or, voilà que l’attentat, semble-t-il, met un terme à sa visite annoncée, puisque selon des témoignages, sa limousine qui aurait été entièrement détruite et dans laquelle il se serait trouvé avec son fils, aurait été enlevée rapidement de la scène du crime par les autorités syriennes qui maintiennent leur version des « 17 tués et 14 blessés, tous des civils! »

La version plausible

Quant à la troisième thèse et qui semble être la plus plausible, Bachar al-Assad aurait finalement lu dans le livre machiavélique de son feu père Hafez al-Assad et aurait concocté toute cette affaire pour les raisons suivantes :

En se positionnant comme victime d’un acte de terrorisme semblable à ce qui touche Israël et les Américains ainsi que les Irakiens en Irak, le régime syrien attirera sans aucun doute l’attention mais aussi la sympathie des grands, le sortant ainsi de son isolation imposée par les États-Unis en particulier;

En éliminant un officier de haut rang qui allait témoigner sans doute contre sa personne, sa famille régnante et son régime en l’impliquant directement dans l’assassinat de l’ex-Premier ministre libanais, Assad mettrait indirectement fin à la durée de vie du Tribunal. Cela est d’autant plus vrai que les finances consacrées par l’ONU à ce tribunal international sont très limitées dans le temps et donc le tribunal ne peut survivre plus de deux ans;

En utilisant un bouc émissaire sunnite, il pourra alors justifier que ce sont les Sunnites intégristes du Nord du Liban et notamment à Tripoli et dans la région du Akkar qui sont derrière ce complot. Cette justification lui donnera alors les excuses pour une opération militaire de grande envergure contre les bases de ces derniers, au Liban. Cela est d’autant plus vrai surtout si l’armée libanaise n’arrive pas à entrer dans cette zone pour des raisons purement politiques largement créées par les alliés politiques de Damas au Liban. Ce faisant, l’armée libanaise serait alors désignée comme faible et incapable de mettre un terme à ces bases d’Al-Qaïda, justifiant du fait une opération militaire syrienne de grande envergure sur le sol libanais. Ce sera prendre la revanche sur les Libanais et contrôler de nouveau une partie importante du Nord sous prétexte de sauvegarder la Syrie des attaques à partir du Liban. Bien entendu, pour cela, l’armée libanaise devrait être affaiblie et son moral miné. Une campagne est alors nécessaire pour cela.

Or, il semblerait qu'elle soit déjà commencée, car pour la seconde fois, les soldats libanais sont la cibles au Liban Nord d’attentats suicides. Ce qui rend cette thèse plus crédible que les autres, c’est que récemment, le régime syrien aurait opéré une purge au sein de son armée sunnite et aurait massé les meilleurs de ses troupes d’élites alaouites, les tristement fameuses Panthères Roses sur la frontière libano-syrienne comme pour envoyer un message d’intimidation à l’actuel gouvernement libanais.

La maillon manquant…

Ainsi, cet attentat ne serait qu’un leurre de la part d’un Bachar al-Assad qui suit maintenant les enseignements machiavéliques de feu son père dans une optique plus générale, celle de sortir de l’isolement en ayant en main les meilleures cartes possibles pour une meilleure négociation avec les Israéliens mais surtout avec les Américains. Ce qui lui manque pour concrétiser cela, c’est un attentat majeur contre une ambassade ou des dignitaires occidentaux en Syrie même et dont les auteurs viendraient, bien entendu, du milieu sunnite… libanais !

Thursday, September 4, 2008

Incident ou Meurtre prémédité avec message à l’appui?





Le Hezbollah abat un hélicoptère de l’Armée libanaise et tue son pilote

Incident ou Meurtre prémédité
avec message à l’appui?


Alain-Michel Ayache

Lorsque l’information est tombée, ma première réaction était de la vérifier pour voir si les agences de presse ne s’étaient pas trompées – bien que rares sont les erreurs de ces dernières, voire impossible – en annonçant qu’un hélicoptère de l’Armée libanaise avait été abattu au dessus d’une zone contrôlée par le Hezbollah au Sud Liban. Hélas! L’information était correcte et un hélico de l’Armée libanaise avait bel et bien été « forcé » d’atterrir selon les premiers rapports. Or, ce qui est étrange dans cette affaire, ce sont les explications fournies aussi bien par le Hezbollah que par l’Armée libanaise.

En effet, le communiqué de l’Armée s’est contenté de présenter l’information dans ses faits… mais pas tous, en attendant l’enquête sur le terrain. Quant au Hezbollah, il a promis une coopération « sans faille » pour faire la lumière sur « ce regrettable incident » où un « hélicoptère de l’armée a été pris par erreur pour un hélicoptère israélien » !!! Le Hezbollah a ajouté qu’il « livrera la personne responsable de cet incident à la justice libanaise ».

Des questions qui en soulèvent d’autres plus graves !

À analyser de près cet incident, un observateur averti poserait plusieurs questions en tentant d’obtenir des éclaircissements plausibles à une telle affaire. Parmi ces questions, l’on peut répertorier les suivantes :

1)- Qu’est-ce qu’un hélicoptère de l’Armée faisait au dessus d’une région très sensible entièrement contrôlée par le Hezbollah et une zone que l’Armée israélienne avait eu du mal à y accéder durant la guerre de juillet 2006?

2)- Comment une milice comme celle du Hezbollah, qui se prétend capable de détruire une armée sophistiquée comme celle de Tsahal et qui a annoncé être capable de mettre « l’ennemi à genoux » et « d’éradiquer ses espions libanais sur le sol libanais » a pris un hélicoptère GAZELLE (SA-341) libanais et visible en tant que tel pour un hélicoptère israélien?

3)- Comment une milice voire une armée comme celle du Hezbollah qui clame haut et fort qu’elle est capable de repousser toute « invasion » israélienne et/ou américaine, présente la personne qu’elle a remise à la justice libanaise comme étant le responsable de cet incident en le décrivant comme ayant été victime de « panique ». Ce qui l’a conduit à tirer avec son fusil d’assaut sur l’hélico! Quatre balles seulement, forçant l’hélico à atterrir, tuant le pilote et blessant le copilote?

4)- Que dire des autres occupants de l’hélico, qui, semblerait, avaient été tabassés après, malgré qu’ils s’étaient identifiés aux miliciens du Hezbollah comme étant de l’Armée libanaise? Que dire alors des informations qui restent toujours à vérifier que le Capitaine Samer Hanna, pilote de l’hélico aurait été exécuté sommairement après que l’un des miliciens lui avait demandé de s’identifier?

Plusieurs autres questions hantent actuellement aussi bien les Libanais que la classe politique plus divisée que jamais malgré un semblant d’union autour d’un nouveau gouvernement censé trouver une solution au pays. Or, examinées sous tous les angles, ces questions portent en elles plus de mystères que la zone survolée par cet hélico.

De spéculations en explications, la vérité est masquée

Ainsi, il serait plausible d’apporter une explication logique à ce qui s’est réellement passé, conscient du fait que cela peut également être considéré comme une spéculation. Mais les choses sur place étant ce qu’elles sont, la chance à ce que ce scénario soit réellement produit nous semble plus proche de la réalité que le Hezbollah essaye actuellement de miroiter au public libanais et arabe.

Tout d’abord, la région connue sous le nom de « Tallet (Colline de) Soujod » est l’une des régions les plus militairement sensibles pour le Hezbollah où il tient une présence active et très discrète. C’est une zone hautement militarisée mais invisible à l’œil de l’observateur de la FINUL car en dehors de la région qu’il supervise. Ensuite, le Hezbollah savait que depuis quelques jours, l’Armée libanaise effectuait des entraînements d’autant plus que les instances militaires du Hezbollah avaient été informées de ces derniers. Or, il semblerait que cette zone ait été interdite d’accès même à l’Armée car zone très sensible et probablement, forteresse militaire de laquelle « les surprises » contre Israël partiront. En effet, nul n’ignore la capacité militaire actuelle du Hezbollah et son armement plus que sophistiqué que l’Iran, la Syrie et la Russie mettent à sa disposition. Ainsi, le fait que l’hélico se serait dangereusement approché d’un des sites d’enfouissement éventuels ou d’installations de tels équipements militaires pourrait bel et bien être à l’origine de cet incident.

À cela s’ajoute la seconde question principale, celle de savoir pourquoi (comment) le pilote a été tué. Selon les premières explications contradictoires fournies, le pilote aurait été tué en vol. Or, les médias libanais, notamment l’Orient-Le-Jour rapporte que le pilote aurait été exécuté de sang froid après l’atterrissage de l’avion. Selon cette version, l’un des assaillants aurait demandé au pilote son nom comme pour s’assurer de son identité avant de l’exécuter de sang froid, laissant le corps gésir dans son sang pendant des heures pendant que les autres occupants étaient tabassés, comme pour envoyer un message clair à l’Armée libanaise.

Un message « clair » à l’Armée

Ainsi, le Hezbollah semble vouloir marqué son territoire aérien également comme zone interdite même à l’État libanais confirmant ainsi sa position d’hégémon sur non seulement la politique libanaise, mais également sur son armée.

La remise d’un jeune militant du Hezbollah à la justice libanaise en le présentant comme l’auteur de cet « incident regrettable » pour avoir « pris par erreurs » des soldats libanais pour des « Israéliens » ne peut être considérée par les observateurs qu’une mascarade pour étouffer rapidement cette affaires qui a soulevé le colère populaire, notamment chez les Chrétiens après l’exécution de l’un des leurs, le pilote Samer Hanna.

Ce précédent devient alors un message à prendre très au sérieux par l’État-Major de l’Armée avec son nouveau chef, le Général Jean Kahwaji qui s’était illustré en 1990 par son opposition à l’invasion syrienne alors qu’il était un des officiers supérieurs de la 10ème Brigade héliportée de l’Armée. Une troupe d’élite qui avait payé le plus lourd des tribus après que l’ordre lui ait été donné par le Général Aoun, Premier ministre par Intérim à l’époque, pour baisser les armes et répondre aux ordres du Général Émile Lahoud, Commandant en chef de l’Armée à l’époque. Le résultat était l’exécution de plusieurs centaines de ses officiers et soldats aux mains de l’armée d’occupation syrienne.

Et la question demeure : Est-ce réellement un incident regrettable ou une nouvelle campagne pour la prise de contrôle de l’ensemble des institutions du pays par le Hezbollah, l’Iran et la Syrie? Les jours à venir pourraient éventuellement fournir une réponse à la condition que les politiciens libanais et le nouveau Commandant en Chef de l’Armée aient le courage d’avouer la vérité… et de l’afficher au grand jour!

Friday, August 29, 2008

Trois scénarios pour l'avenir d'Israël


Le Droit
Actualités, vendredi, 29 août 2008, p. 19

À vous la parole

Trois scénarios pour l'avenir d'Israël

La décision du premier ministre israélien, Ehud Olmert, de démissionner, sonne le glas d'une courte ère aux conséquences néfastes pour l'image de marque d'Israël.

Depuis la "Seconde guerre du Liban" en juillet 2006 contre le Hezbollah et la victoire politique de ce dernier, Ehud Olmert s'est retrouvé dans le collimateur de la droite israélienne qui lui reproche non seulement d'avoir mal géré une guerre, mais d'avoir également et surtout affaibli l'image dissuasive d'un Israël fort dans un océan islamiste hostile à l'État hébreu. Cela est devenu plus grave encore suite au dernier échange de prisonniers avec le Hezbollah grâce à la médiation allemande. Un échange qui crédite plus "la victoire du Hezbollah" dans la rue arabe, mais qui en contrepartie revêt pour les Israéliens un visage humanitaire pour apporter une fin à la souffrance des parents des deux soldats israéliens enlevés par les miliciens du Hezbollah en 2006. Or, bien que l'ensemble de la classe politique israélienne se félicite du retour des corps des soldats, il n'en demeure pas moins que le charisme d'Olmert et son savoir-faire sont pointés du doigt par le Likoud. À cela s'ajoute la série de scandales qui touchent personnellement le premier ministre israélien. Tout cela ne pouvait que se terminer logiquement par la démission d'Ehud Olmert. Ce qui est chose faite.

Impact considérable

Ainsi, trois scénarios s'offrent actuellement aux Israéliens et qui auront certainement un impact considérable sur l'ensemble de la région du Proche et Moyen-Orient et sur l'avenir des pourparlers de paix entre Palestiniens et Israéliens.

1- Le Likoud élu : Un succès de Benjamin Nétanyahou donnera sans doute plus d'ailes à Tsahal et une remontée du moral des troupes car nul n'ignore le langage fort et direct du chef du Likoud qui oppose toute concession aux groupes "terroristes" ou aux ennemis d'Israël.

Cela se traduira notamment par une éventuelle attaque préventive contre les installations nucléaires iraniennes, si Téhéran persiste dans son programme nucléaire et ignore les demandes de l'Occident. Advenant une telle attaque, le résultat sera la montée encore plus grave des prix du pétrole et une crise économique sans précédent qui touchera l'Occident en entier sans parler des conséquences militaires des éventuelles représailles de parts et d'autres.

2- Les Travaillistes élus : Une telle possibilité rappellera sans aucun doute les déboires d'une politique israélienne "barakienne" qui n'a abouti depuis 2000 qu'à ternir l'image de marque de l'État hébreu et dont le retrait anticipé du Liban en mai 2000 - voulu par Barak pour des raisons purement de politique-politicienne israélienne - ne fera que donner plus d'incitatifs au Hamas et au Hezbollah de s'attaquer encore plus au processus de paix et aux Israéliens quitte à les pousser vers plus de concessions en vue d'une victoire finale contre eux.

3- Kadima réélu : Dans le cas de succès de Kadima, la tâche du remplaçant d'Olmert serait celle de regagner la confiance de la majorité de l'opinion publique israélienne tout en solidifiant de nouveau l'image de marque d'Israël. Bien entendu, le processus de paix avec les Palestiniens devrait trouver de nouveaux incitatifs et l'avenir des colonies dans la Cisjordanie clairement précisé pour éviter tout blocage de ce processus. Ce qui ne sera sans doute pas facile à faire dans un contexte aussi fragile dans lequel passe l'ensemble de la région.

Ces trois scénarios ne permettent tout de même pas de savoir si l'État hébreu réussira à relever le défi de résister à l'agresseur tout en cherchant en même temps à aboutir avec les pays arabes à une paix durable à travers notamment la création d'un État palestinien voisin, mais surtout avec une entente avec la Syrie. Dans ce dernier cas de nombreuses questions sont posées dont celles ayant trait à la position de Damas vis-à-vis du Hezbollah et de l'Iran, maintenant que le Hezbollah semble aux commandes du Liban.

Les mois à venir sont cruciaux aussi bien pour Israël, que pour la Syrie, l'Iran et le Liban. Une quelconque fausse décision politique pourrait enflammer la région et affecter les économies des plus grands... L'Occident ne sortira point nécessairement le grand gagnant et l'instabilité interne pourra le gangrener de l'intérieur dû au terrorisme latent...

Alain-Michel Ayache,
Département de science politique,
Université du Québec à Montréal

Illustration(s) :

Archives, La Presse
Ehud Olmert

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Numéro de document : news·20080829·LT·0025

Sunday, August 24, 2008

L'avenir d'Israël est en jeu



Le Droit
Forum, samedi, 23 août 2008, p. 25

L'avenir d'Israël est en jeu

"Chose promise, chose due !" Ce sont les paroles que le secrétaire général du Hezbollah, Sayyed Hassan Nasrallah a prononcées devant les dizaines de milliers de fidèles venus accueillir les prisonniers libanais libérés par Israël. Le Hezbollah sort ainsi grand gagnant de cette entente conclue avec Israël à travers le médiateur allemand. Cela est d'autant plus vrai que depuis mai 2000, date du retrait des troupes israéliennes du Sud Liban suite à la politique d'autruche décidée par Ehud Barak, la milice chiite pro-iranienne a remporté le premier volet d'une guerre de longue haleine contre l'État hébreu.Cette victoire est avant tout dans la rue arabe quelles que soient la religion et les affinités politiques que cette rue détienne.

Après la décision de démission du premier ministre israélien Ehouh Olmert, Sayyed Hassan Nasrallah confirme encore une fois sa position de "leader" incontesté de la rue arabe et musulmane tous azimuts.En effet, en s'affichant comme le parti qui a su mettre à genoux la plus puissante des armées de la région, le Hezbollah a d'un seul coup remonté le moral arabe et lui a donné une cause nouvelle et un espoir de reprendre la revanche sur un Occident colonialiste et impérialiste ; et par-dessus tout, de reprendre le combat contre l'Infidèle, le Croisé et plus tard le Mécréant qui avaient conquis la "Terre Sainte de l'Islam", Jérusalem.Mieux encore, la victoire politique sans contestation de la guerre de juillet 2006 a donné plus de poids à la stature de Sayyed Hassan Nasrallah. Ce dernier est devenu le porte-parole de la résistance islamique non seulement au Liban mais à travers le monde arabo-musulman où les peuples cherchent désespérément une figure historique qui leur rappelle l'apogée de l'Islam dans les siècles passés face à un Occident en perdition et dont la société n'a plus de valeurs au sens sociétal et familial du terme. Ainsi, Nasrallah devient l'exemple de la pureté de l'esprit musulman et de la lutte contre "l'Infidèle" et le "Sioniste".

Les signes de faiblesse

La décision d'Olmert de démissionner quelques jours seulement après avoir accepté de libérer les prisonniers libanais et palestiniens est le résultat direct d'une faiblesse sans contestation de cette politique "olmertienne". Ce qui pousse la rue arabe encore vers une quasi-adoration de Nasrallah pour ajouter "victoire" après "victoire" contre l'État hébreu.Or, à analyser de près la politique "olmertienne", l'on constate qu'elle est pour le moins dangereuse pour l'avenir même de l'État hébreu, aussi réaliste et "humanitaire" qu'elle ne paraisse aux yeux de l'actuel gouvernement israélien.Avec la montée en puissance d'un Hezbollah plus que jamais fort d'un appui populaire, non seulement chiite, mais sunnite dans certains cas (à Gaza et certains pays arabes) et chrétien dans d'autres (au Liban), rien ne garantit à Israël que les demandent et exigences du Hezbollah vont s'arrêter !

De plus, l'insistance du Hezbollah sur la l'identité libanaise des fermes de Chebaa malgré qu'elles aient été conquises par Israël de l'armée syrienne, fait en sorte que ce dossier demeure comme une épée de Damoclès pour Israël. Sans oublier, bien entendu, l'armement sophistiqué du Hezbollah et sa présence au nord de la frontière israélienne même si c'est interdit par le Conseil de sécurité des Nations unies.À cela s'ajoute un Iran plus fort que jamais et une politique américaine chancelante et en perdition dans la région, malgré une apparence de confrontation avec l'État perse.

Faible Israël

Ainsi, Israël n'a jamais paru aussi faible aux yeux de la rue arabe qui rêve maintenant de donner l'assaut final pour libérer Jérusalem et rendre à l'Islam son prestige d'antan. Mais alors comment faire pour mettre un terme à cette faiblesse ? La question se pose dans plus d'un cercle, aussi bien israélien qu'occidental. La réponse demeure toutefois insatisfaisante car les conséquences pourraient être graves non seulement pour Israël mais pour l'ensemble de la région voire de la planète.Trois scénarios sont plausibles et tous les trois passent par le remplacement d'Ehud Olmert à la tête du gouvernement israélien. Le premier se traduirait sans doute par l'arrivée au pouvoir de l'aile radicale d'Israël, représentée en partie par le Likoud et donc par Benjamin Nétanyahou. La seconde, serait que le parti Kadima demeure au pouvoir en substituant son chef par un autre dont le charisme fera en sorte de sauvegarder l'honneur. Le dernier cas de figure serait celui de l'arrivée des Travaillistes d'Ehud Barak à la tête du gouvernement.

Alain-Michel Ayache,
Département de science politique,
Université du Québec à Montréal
© 2008 Le Droit. Tous droits réservés.
Numéro de document : news·20080823·LT·0038

Thursday, August 21, 2008

Israël, l'avenir en jeu - la vision israélienne





Israël, l'avenir en jeu

La vision israélienne

Alain-
Michel Ayache

Il fallait s’y attendre, la décision du Premier ministre israélien, Ehud Olmert, de démissionner, sonne le glas d’une courte ère aux conséquences néfastes pour l’image de marque d’Israël.

En effet, depuis la « Seconde guerre du Liban » en juillet 2006 contre le Hezbollah et la victoire politique de ce dernier, Ehud Olmert s’est retrouvé dans le collimateur de la droite israélienne qui lui reproche non seulement d’avoir mal géré une guerre, mais d’avoir également et surtout affaibli l’image dissuasive d’un Israël fort dans un océan islamiste hostile à l’État hébreu. Cela est devenu plus grave encore suite au dernier échange de prisonniers avec le Hezbollah grâce à la médiation allemande. Un échange qui crédite plus « la victoire du Hezbollah » dans la rue arabe, mais qui en contrepartie revêt pour les Israéliens un visage humanitaire pour apporter une fin à la souffrance des parents des deux soldats israéliens enlevés par les miliciens du Hezbollah en 2006. Or, bien que l’ensemble de la classe politique israélienne se félicite du retour des corps des soldats, il n’en demeure pas moins que le charisme d’Olmert et son savoir-faire sont pointés du doigt par le Likoud. À cela s’ajoute la série de scandales qui touchent personnellement le Premier ministre israélien. Tout cela ne pouvait que se terminer logiquement par la démission d’Ehud Olmert. Ce qui est chose faite.

Ainsi, trois scénarios s’offrent actuellement aux Israéliens et qui auront certainement un impact considérable sur l’ensemble de la région du Proche et Moyen-Orient et sur l’avenir des pourparlers de paix entre Palestiniens et Israéliens.

1—Arrivée du Likoud au gouvernement

Un succès de Netanyahu donnera sans doute plus d’ailes à Tsahal et une remontée du moral des troupes car nul n’ignore le langage fort et direct du chef du Likoud qui oppose toute concession aux groupes « terroristes » ou aux ennemis d’Israël. Cela se traduira notamment par une éventuelle attaque préventive contre les installations nucléaires iraniennes, si Téhéran persiste dans son programme nucléaire et ignore les demandes de l’Occident. Advenant une telle attaque, le résultat sera la montée encore plus grave des prix du pétrole et une crise économique sans précédent qui touchera l’Occident en entier sans parler des conséquences militaires des éventuelles représailles de parts et d’autres.

2—Arrivée des Travaillistes au gouvernement

Une telle possibilité rappellera sans aucun doute les déboires d’une politique israélienne « barakienne » qui n’a aboutit depuis 2000 qu’à ternir l’image de marque de l’État hébreu et dont le retrait anticipé du Liban en mai 2000 – voulu par Barak pour des raisons purement de politique-politicienne israélienne – ne fera que donner plus d’incitatifs au Hamas et au Hezbollah de s’attaquer encore plus au processus de paix et aux Israéliens quitte à les pousser vers plus de concessions en vue d’une victoire finale contre eux.

3—Kadima qui réussit à garder le gouvernement

Dans le cas de succès de Kadima, la tâche du remplaçant d’Olmert serait celle de regagner la confiance de la majorité de l’opinion publique israélienne tout en solidifiant de nouveau l’image de marque d’Israël. Bien entendu, le processus de paix avec les Palestiniens devrait trouver de nouveaux incitatifs et l’avenir des colonies dans la Cisjordanie clairement précisé pour éviter tout blocage de ce processus. Ce qui ne sera sans doute pas facile à faire dans un contexte aussi fragile dans lequel passe l’ensemble de la région.

L’avenir d’Israël en jeu

Ainsi définis, ces trois scénarios ne permettent tout de même pas de savoir si l’État hébreu réussira à relever le défi de résister à l’agresseur tout en cherchant en même temps à aboutir avec les pays arabes à une paix durable à travers notamment la création d’un État palestinien voisin, mais surtout avec une entente avec la Syrie. Dans ce dernier cas de nombreuses questions sont posées dont celles ayant trait à la position de Damas vis-à-vis du Hezbollah et de l’Iran, maintenant que le Hezbollah semble aux commandes du Liban.

Quoi qu’il en soit, les mois à venir sont cruciaux aussi bien pour Israël, que pour la Syrie, l’Iran et le Liban. Une quelconque fausse décision politique pourrait enflammer la région et affecter les économies des plus grands… L’Occident ne sortira point nécessairement le grand gagnant et l’instabilité interne pourra le gangrener de l’intérieur dû au terrorisme latent...

Israël, l'avenir en jeu - la réaction arabe





Israël, l'avenir en jeu

La réaction arabe


Alain-Michel Ayache

Il y a quelques semaines, suite à l’accord conclut avec Israël par l'intermédiaire de la médiation allemande pour libérer les prisonniers libanais et palestiniens des prisons israéliennes en échange des corps des deux soldats israéliens, le Secrétaire général du Hezbollah, Sayyed Hassan Nasrallah, déclarait publiquement devant des dizaines de milliers de partisans « chose promise, chose due! »

Aujourd'hui, deux ans après sa « victoire divine », Nasrallah, s’adresse aux Libanais – et aux Arabes – sur la chaîne de télévision satellitaire du Hezbollah, Al-Manar. Dans son discours à la nation arabe de près de 70 minutes, il souligne les réalisations de son parti et critique à la fois Israël et les États-Unis. Il dépeint la guerre de 2006 comme le début de la fin du mythe israélien.

En effet, Nasrallah évoque cette guerre de 2006 comme étant derrière le licenciement d'un certain nombre de dirigeants militaires en Israël, ainsi que derrière l'effondrement du populaire Premier ministre Ehud Olmert, qui a dit aux Israéliens – comme Nasrallah le rapporte – qu'il « est mort dans la guerre au Liban, mais a été enterré au bout de deux ans, en raison des scandales de corruption ».

Nasrallah a critiqué le point de vue israélien qui croit que la raison de défaite dans cette guerre, était due au manque d'expérience, en particulier au sein de l’équipe dirigeante aussi bien politique que militaire. Il rappelle ironiquement à ceux qui accusent l’actuelle Administration israélienne et la blâment de la défaite de juillet 2006 (en particulier Ehud Barak), la première « défaite d'Israël et son retrait du Liban en 2000 ».

Un changement important dans le lexique états-unien

Par ailleurs, le Secrétaire général a souligné que les répercussions de cette guerre ainsi que la disparition de l'utilisation des termes « nouveau Moyen-Orient », qui a été annoncée par la secrétaire d'État américaine Condoleezza Rice, confirment que cette approche s'est effondrée et ses termes sont rendus obsolètes.

Il a en outre souligné que les pourparlers syro-israéliens en cours sont le résultat de ces conséquences, « car Israël a abandonné la politique de menaces et s’est tourné vers la politique de négociation ». De même, Nasrallah a évoqué « la confusion actuelle d'Israël vis-à-vis l’Iran, où « L’État hébreu est encore réticent à prendre des mesures concrètes s'il y a lieu d'attaquer l'Iran ou pas! »

La confirmation de son leadership

Ces déclarations soulignent la montée en puissance du Hezbollah depuis l’an 2000 à la suite de la triple « victoire » politique qu’il a marquées contre Israël, et qui sont le retrait rapide du Liban en Mai 2000, la guerre de 2006 et plus tard l’échange de prisonniers en 2008 qui poussent Israël à libérer un tueur d’enfant ainsi que des prisonniers de guerre du Hezbollah et d'autres prisonniers palestiniens.

Aujourd'hui, après la prise de Beyrouth de Mai 2008 par les combattants du Hezbollah et la formation d'un nouveau gouvernement libanais, où les ministres chiites et leurs alliés détiennent un droit de veto sur toutes les décisions du Cabinet, les voix qui osent s’élever pour demander l’élimination des armes du Hezbollah sont étouffées par la machine de guerre et de propagande de ce dernier. En effet, dans son discours télévisé, Nasrallah insiste sur le fait que les « armes de la résistance » sont sacrées et souligne que « les partis libanais ne doivent pas essayer de demander leur élimination, car cela serait jouer le jeu israélien, pour désarmer la résistance, alors que le territoire libanais reste encore occupé ».

Aujourd’hui, dans la langue du commun des mortels, cette « victoire » est unique. En effet, la rue arabe l’endosse quelle que soit la religion et les affinités politiques que cette rue détienne. D’ailleurs, la décision de démission du Premier Ministre israélien, Sayyed Hassan Nasrallah confirme encore une fois sa position de « leader » incontesté de la rue arabe et musulmane tous azimuts.

Une image plus solide que jamais

En effet, en s’affichant comme le parti qui a su mettre à genoux la plus puissante des armées de la région voire du monde, le Hezbollah a d’un seul coup remonté le moral de la rue arabe et lui a donné une cause nouvelle et un espoir de reprendre la revanche sur un Occident colonialiste et impérialiste; et par-dessus tout, de reprendre le combat contre l’Infidèle, le Croisé et plus tard le Mécréant qui avaient conquis la « Terre Sainte de l’Islam : Al-Quds » (Jérusalem). Mieux encore, la victoire politique sans contestation de la guerre de juillet 2006 a donné plus de poids à la stature du Secrétaire général du Hezbollah, Sayyed Hassan Nasrallah.

Ce dernier est devenu le porte-parole de la résistance islamique non seulement au Liban mais à travers le monde arabo-musulman où les peuples cherchent désespérément une figure historique qui leur rappelle les victoires passées de l’Islam et son apogée dans les siècles passés face à un Occident en perdition et dont la société n’a plus de valeurs au sens sociétal et familial du terme. Ainsi, Nasrallah devient l’exemple de la pureté de l’esprit musulman et de la lutte contre « l’Infidèle » et le « Sioniste ».

Les signes de faiblesse d’Olmert…

La décision d’Olmert de démissionner quelques jours seulement après avoir accepter de libérer les prisonniers libanais et palestiniens dont Samir Al-Kantar, accusé par Israël d’avoir commis un massacre en plein territoire israélien, est le résultat direct d’une faiblesse sans contestation de cette politique « olmertienne ». Ce qui pousse la rue arabe encore vers une quasi-adoration de Nasrallah pour ajouter « victoire » après « victoire » contre l’État hébreu.

Or, à analyser de près la politique « olmertienne », l’on constate qu’elle est pour le moins dangereuse pour l’avenir même de l’État hébreu, aussi réaliste et « humanitaire » qu’elle ne paraisse aux yeux de l’actuel gouvernement israélien. En effet, avec la montée en puissance d’un Hezbollah plus que jamais fort d’un appui populaire, non seulement chiite, mais sunnite dans certains cas (à Gaza et certains pays arabes) et chrétien dans d’autres (au Liban), notamment après la dernière crise interlibanaise, rien ne garantit à Israël que les demandent et exigences du Hezbollah vont s’arrêter!

De plus, l’insistance du Hezbollah sur la l’identité libanaise des fermes de Chebaa malgré qu’elles aient été conquises par Israël de l’armée syrienne, fait en sorte que ce dossier demeure comme une épée de Damoclès pour Israël. Sans oublier, bien entendu, l’armement sophistiqué du Hezbollah et sa présence au nord de la frontière israélienne malgré la présence de la FINUL censée interdire cela selon la résolution 1701 du Conseil de Sécurité des Nations Unies. À cela s’ajoute un Iran plus fort que jamais et une politique américaine chancelante et en perdition dans la région, malgré une apparence de confrontation avec l’État perse.

…Et le message capté par la rue arabe !

Ainsi, Israël n’a jamais paru aussi faible aux yeux de la rue arabe qui rêve maintenant de donner l’assaut final pour libérer « Al-Quds » et rendre à l’Islam son prestige d’antan. Mais alors comment faire pour mettre un terme à cette faiblesse? La question se pose dans plus d’un cercle, aussi bien israélien qu’occidental. La réponse demeure toutefois insatisfaisante car les conséquences pourraient être graves non seulement pour Israël mais pour l’ensemble de la région voire de la planète.

En effet, dans cette réponse trois scénarios sont plausibles et tous les trois passent par le remplacement d’Ehud Olmert à la tête du gouvernement israélien :

Le premier se traduirait sans doute par l’arrivée au pouvoir de l’aile radicale de la société israélienne, représentée en partie par le Likoud et donc par Benjamin Netanyahu. La seconde, serait que l’actuel parti au pouvoir, Kadima, reste au pouvoir en substituant son chef, donc en remplaçant Olmert par un autre dont le charisme fera en sorte de sauvegarder l’honneur du parti sans pour autant permettre aux plus radicaux de reprendre le dessus. Le dernier cas de figure serait celui de l’arrivée des Travaillistes au pouvoir et donc d’Ehud Barak à la tête du gouvernement.

Sunday, August 10, 2008

La visite du président syrien en Iran, Prélude à un rôle nouveau?

Le Devoir
IDÉES, samedi, 9 août 2008, p. b5

La visite du président syrien en Iran
Prélude à un rôle nouveau?

Alain-Michel Ayache

À priori, la récente visite du président syrien Bachar al-Assad en Iran s'inscrit dans le cadre d'un exercice diplomatique annuel que ce dernier s'est habitué à faire depuis l'accession au pouvoir du président iranien Mahmoud Ahmadinejad. Or le fait qu'elle ait eu lieu la fin de semaine où l'ultimatum occidental, pour que l'Iran accepte de se plier aux exigences de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), venait (du moins théoriquement) à échéance la rend particulière, et pour cause: la dernière rencontre entre Assad et le président français Nicolas Sarkozy semble avoir donné lieu à un accord tacite entre les deux hommes.

En effet, tout porte à croire que le président français aurait promis un retour de la diplomatie syrienne à la table des grands au Proche et au Moyen-Orient, en échange de bons offices et de concessions de la part de Damas. Ce qui s'était traduit quelques jours après la rencontre au sommet de Paris par l'acceptation de Damas, pour la première fois depuis son indépendance, d'établir des représentations diplomatiques avec le Liban, le reconnaissant enfin comme un pays souverain à part entière.

Le second geste de Damas fut de lancer un signe «encourageant» - selon les commentaires de certains diplomates occidentaux - à l'égard d'Israël pour rétablir le dialogue afin d'aboutir à une paix durable. De plus, l'annonce faite à Paris par le président Sarkozy qu'Assad aurait demandé à Paris et à Washington d'intercéder auprès de Tel-Aviv pour reprendre les négociations prouve que Damas semble avoir finalement réussi à briser le mur d'isolement que l'administration Bush avait mis en place après l'assassinat de l'ex-premier ministre libanais Rafic Hariri, le 14 février 2005.

D'autres signes viennent s'ajouter à l'importance du rôle que les Occidentaux semblent de plus en plus vouloir octroyer à la Syrie, dont la médiation turque avec Israël pour la reprise des négociations de paix entre les deux parties, mais également les déclarations à Washington du vice-premier ministre israélien, Shaul Mofaz, sur la nécessité pour Israël «de poursuivre ses pourparlers de paix avec la Syrie sous médiation turque et sans condition préalable», laissant du coup une large marge de manoeuvre aux Syriens! Tout cela souligne les changements sur lesquels Damas table pour reprendre un rôle régional qui lui est dû, selon des observateurs arabes. D'ailleurs, la montée récente du pouvoir chiite appuyé par l'Iran dans l'ensemble des pays du Golfe, mais surtout au Liban, rend le rôle syrien indispensable pour créer une zone tampon entre les diplomaties arabes et perse. En effet, le fait que la Syrie, pays de l'arabité, soit l'alliée inconditionnelle de l'Iran et le passage obligé des armes iraniennes vers les combattants du Hezbollah la positionne comme un élément majeur à prendre en considération dans la politique de rétablissement d'un certain équilibre régional brisé depuis l'invasion américaine de l'Irak en 2003.

Par ailleurs, nul n'ignore le rôle que Damas joue auprès des mouvements terroristes et des islamistes du Hamas, en Irak contre les troupes américaines, au Liban avec le Hezbollah et même mondialement à travers l'aide logistique apportée à des groupements révolutionnaires et autres. Or cela a fini par lui donner plus de poids dans la défense de son rôle vis-à-vis des grandes puissances en général et de la France en particulier. Le résultat semble encourageant pour le président syrien, d'autant plus que le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a annoncé il y a quelques semaines que le financement pour le tribunal international censé se pencher sur l'assassinat de l'ex-premier ministre libanais Hariri, duquel Damas est accusé, était limité dans le temps. En d'autres termes, le tribunal risque de ne pas voir le jour pour condamner les responsables syriens de l'assassinat ou, s'il est mis en place, sa «vie» ne sera que de quelques mois, deux ans au maximum! Ce qui fait dire à certains qu'une entente secrète aurait été conclue avec Damas pour lui donner encore du temps afin de prouver «sa bonne foi» en poussant son allié iranien à mettre son programme nucléaire aux oubliettes.

Ainsi, la dernière visite d'Assad en Iran ne serait, en principe, qu'un message occidental à livrer via la Syrie pour que Téhéran laisse l'option nucléaire de côté. Or cette politique de l'autruche que l'Occident semble de nouveau suivre ne fait que retarder une échéance certaine, celle qui mènera sans aucun doute la région dans son ensemble vers une guerre sans merci. Un affrontement qui finira par englober la planète en entier, car nul n'ignore l'importance stratégique des ressources naturelles de cette région et leurs effets sur les économies des grandes puissances en particulier. Ce qui fait dire à beaucoup que l'Iran ne changera rien dans sa politique actuelle, attendant les prochaines élections américaine et israélienne. Pour l'instant, toutes les tergiversations font gagner du temps à Téhéran et permettent à Damas de récupérer une place (de choix?!) sur la scène internationale. Dans les deux cas, «l'Axe du mal» semble le grand gagnant, du moins jusqu'à présent!

Alain-Michel Ayache : Spécialiste du Proche-Orient et du Moyen-Orient au département de science politique de l'UQAM©2008 Le Devoir. Tous droits réservés.
Numéro de document : news·20080809·LE·200870


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Thursday, August 7, 2008

L'humanitaire versus le terrorisme





L'humanitaire versus le terrorisme


Alain-Michel Ayache

Deux ans après, presque jour pour jour, le Hezbollah remet les corps des deux soldats israéliens qu'il avait kidnappés lors de son attaque par delà la ligne bleue, en territoire israélien. Une attaque qui avait été à l'origine de la « seconde guerre du Liban » de juillet 2006.

Aujourd'hui, les tractations entre le Hezbollah et Israël à travers la médiation allemande, a permis aux Israéliens de rapatrier enfin ces deux corps, en échange d'un grand gain pour le Hezbollah.

La « victoire » du Hezbollah

Pour la rue arabe en général et pour les Libanais en particulier, notamment les prosyriens, cet échange représente la plus grande victoire jusqu'à là achevée par une « résistance musulmane ». Et pour cause. Lors des 33 jours de combats entre le Hezbollah et Tsahal, Jerusalem cherchait à maintenir son image de force de dissuasion pour l'ensemble de ses ennemis. Or, voilà qu'une milice chiite, forte de quelques milliers de combattants, réussit à résister au mythe de l'armée la plus forte de la région, voire l'une des meilleures au monde.

Bien que le prix ait été lourd du côté du Hezbollah, même si officiellement ses chefs nient la perte de plusieurs centaines des leurs parmi les 1200 Libanais tués durant ces affrontement de 2006, et malgré que le Hezbollah n'ait pas réussi durant ces affrontements à interdire l'accès de Tsahal au territoire libanais comme il l'avait à maintes reprises annoncé à ses fidèles, il n'en demeure pas moins qu'Israël a échoué d'atteindre ses objectifs dont le premier, celui de libérer les deux soldats kidnappés. Quant aux armements du Hezbollah, il s'est reconstitué d'une manière encore plus rapide et plus efficace, et ce, même avec la présence de la FINUL censée l'interdire!

Nasrallah, « le héros de l'Islam »

En soi, le fait d'avoir réussi à bloquer les plans d'Israël, mais également à détruire un nombre considérable de ses chars d'assaut qui faisaient la terreur des pays arabes, était une grande victoire pour le Hezbollah au niveau de la rue arabe. De plus, l'image de marque de l'armée indestructible d'Israël avait fini par succomber à la détermination suicidaire des combattants du « Parti de dieu ».

Cela avait largement contribué à la popularité du Hezbollah et de son Secrétaire général Sayyed Hassan Nasrallah. On a vu en lui, le « sauveur » et le « véritable héros » que les leaders arabes n'avaient pas réussi depuis 60 ans à se donner ! Par ailleurs, fort d'une confiance en ses capacités et ses hommes, Sayyed Hassan Nasrallah cherchait à prouver au monde entier et au monde arabe et musulman en particulier, qu'il était un homme de parole. Il leur avait promis la libération des « otages » libanais en Israël, ces prisonniers de guerre qu'Israël avait capturés durant les actions terroristes contre son territoire ou lors de la « Seconde guerre du Liban ». Aujourd'hui, il vient de prouver qu'il respectait sa parole et qu'il agissait en conséquence, ce qui lui vaut du coup une image encore plus solide d' « l'homme intègre » et de « l'héros de l'Islam »…

« Chose promise, chose due ! »

Le fait d'avoir réussi à obliger en quelque sorte Israël à libérer l'ensemble des détenus libanais et de rendre les corps de plusieurs dizaines de combattants arabes et libanais tués durant les nombreux affrontements que vit cette région du monde, est considéré comme un autre coup de massue contre Olmert! Car, Nasrallah avait à maintes reprises déclaré que sa milice resterait armée jusqu'à ce que le dernier otage libanais soit libéré des prisons israéliennes, mais également que les Fermes de Chebaa le soient de même.

En d'autres termes, cela voudrait dire que les armes du Hezbollah demeureront présentes tant et aussi longtemps que ces fermes n'auront pas été remises au Liban, alors qu'officiellement, selon les Nations Unies, la résolution du Conseil de Sécurité 425 qui concernait le retrait de l'occupation du territoire libanais par Tsahal avait été accompli en mai 2000 lors du retrait officiel du dernier soldat israélien. Ce que le Hezbollah refuse de reconnaître tant que ces fermes sont encore occupées, alors qu'en réalité elles l'ont été par Israël durant la guerre de 67 après avoir chassé l'armée syrienne qui s'y trouvait!

Le geste d'Israël et ses répercussions

Pour de nombreux observateurs, Israël ne pouvait plus ignorer son opinion publique et notamment les appels des familles de ces deux soldats. Pour un pays démocratique comme Israël, le gouvernement n'avait plus le choix que d'accepter les demandes des familles et de s'incliner en quelque sorte devant l'humanitaire, en mettant de côté le militaire.

Or, ce geste, s'il est considéré par la majorité de la population comme étant noble et une continuité dans la tradition juive israélienne de ne point laisser derrière, des corps des siens ou des prisonniers de guerre, il n'en demeure pas moins que cela est interprété comme un précédent dangereux par plusieurs. En effet, le fait qu'Israël s'incline devant les demandes du Hezbollah constitue une première car un message erroné serait envoyé du coup à l'ensemble des ennemis de l'État hébreu pour les encourager à entreprendre des actions similaires sachant qu'Israël finira par privilégier l'humanitaire sur le militaire! Cela pourrait affecter la libération du soldat Guilad Shalit actuellement détenu par le Hamas depuis également 2006, juste avant la Seconde guerre du Liban. L'échange ne pourrait être qu'encourageant pour le Hamas et l'inciter à monter les enchères encore plus, dans l'espoir d'augmenter ses gains à l'Instar du Hezbollah…

Ainsi, la libération a sans aucun doute apporté un prestige sans précédant au Hezbollah, ce qui consolide encore plus son pouvoir au Liban, notamment après son succès militaro-politique face au gouvernement pro-occidental…

La question principale sera alors celle de savoir si l'Occident et Israël se voient désormais forcés d'adopter une Realpolitik vis-à-vis du Hezbollah, de la Syrie et de l'Iran faute d'alternatives viables, et ce, pour éviter toute escalade militaire dans la région sur un fond de crise économique sans précédant aux États-Unis!

Sunday, July 20, 2008

Le "souhait" syrien à prendre avec des pincettes!

Le Droit
Actualités, samedi, 19 juillet 2008, p. 25

Le "souhait" syrien
à prendre avec des pincettes !

Pour un novice en relations internationales, le "souhait" du Président syrien, Bachar al-Assad, exprimé cette semaine à Paris, de voir "la France et les États-Unis intercéder" auprès d'Israël pour la reprise officielle des pourparlers de paix entre Damas et Tel-Aviv, paraîtrait comme un "assagissement" et une nouvelle page dans l'histoire du Proche-Orient ! Or, à bien analyser les donnes de la région, un "initié" aux tactiques "assadiennes" laissées en héritage par feu Hafez al-Assad, alias "le Bismarck du Moyen-Orient", à son fils Bachar, démontrent le machiavélisme d'un chef d'État qui tente le tout pour le tout au moment où l'Occident pointe du doigt l'autre "danger", l'Iran.

En effet, cette demande est loin d'être innocente. L'expliquer revient avant tout à démontrer la volonté de Damas de mettre fin au boycott occidental qui la touche dans la région, pour regagner sa place à la table des négociations ; cette place que Damas a perdue avec l'assassinat de l'ex-premier ministre du Liban, Rafic Hariri, en 2005 ainsi que les multiples assassinats politiques dont sont responsables selon toute vraisemblance ses services secrets et plus particulièrement Assef Chaoukat, le beau-frère du Président syrien. Ce faisant, Assad éloigne du coup le spectre du tribunal international qui pointe à l'horizon et cherche à faire la lumière sur ces assassinats.

Mensonge

Or, encouragé par les derniers succès politiques du Hezbollah tant au Liban que face à Israël - notamment dans le dossier de l'échange des prisonniers libanais contre les corps des soldats de Tsahal, kidnappés et tués par la milice pro-iranienne - le président syrien tente de se faire entendre en multipliant les signes de "bonne volonté". Toutefois, s'il est vrai que le Hezbollah contrôle maintenant le Liban face aux pro-occidentaux, il n'en demeure pas moins que c'est davantage l'Iran qui détient jusqu'aujourd'hui la principale clef dès lors qu'il s'agit de convaincre le Hezbollah de faire preuve de retenue ou non. Consciente de cette réalité telle que perçue par l'Occident, Damas, tente coûte que coûte de la changer, en démontrant qu'il ne faut point la considérer comme n'étant qu'un simple passage pour les armes et munitions qui transitent de l'Iran vers le "Parti de dieu".

Cette tentative de changement de "l'image de marque" de Damas explique, selon certains observateurs arabes l'assassinat du responsable militaire du Hezbollah, Imad Moghnieh, à qui on attribue des multiples assassinats et attentats anti-américains et anti-israéliens et qui était qualifié de terroriste le plus recherché par les États-Unis. Or, son assassinat à Damas, ne pouvait être, selon ces mêmes observateurs arabes, que le travail des mêmes services secrets syriens responsables de la série d'assassinats de politiciens et journalistes libanais anti-syriens. D'autres iront jusqu'à dire que pour ce dossier en particulier et pour rapprocher le point de vue syrien de celui des Américains, les services secrets jordaniens s'étaient alliés à cette partie "de chasse au terroriste"... à Damas !

Aujourd'hui, s'il est question de pourparlers secrets entre Damas et Tel-Aviv, Israël ne semble pas prêt à sacrifier sa sécurité et remettre le Golan aux Syriens pour une paix illusoire et d'autant plus fragile, tant et aussi longtemps que Damas ne ferme pas les bureaux de Hamas à Damas et chasse du pays Khaled Mechaal, le leader palestinien de Hamas responsable des actions terroristes contre Israël. De même, tant et aussi longtemps que le Hezbollah est aidé par Damas et ses cadres et ses armements transitant via la Syrie, le Nord d'Israël demeurera sous la menace du Hezbollah et de l'Iran.

Mais alors de quelle paix parle le Président syrien ? Le "souhait" syrien paraît alors un leurre pour acheter du temps tout en misant sur le changement dans la politique américaine à venir avec le nouveau président. Pis, Damas mise sur l'arrivée de Barak Obama au pouvoir, d'autant plus que durant les primaires, le candidat démocrate avait lancé des signes interprétés par Damas comme lui étant favorables, brisant du coup un boycott de l'actuelle administration américaine et ouvrant de nouvelles possibilités au Président syrien.

Ainsi, Damas tentera d'augmenter ses chances en présentant un nouveau visage, celui d'un État voulant enterrer la haine et le passé douloureux. Cette nouvelle page aurait commencé avec l'acceptation récente d'établir des représentations diplomatiques entre la Syrie et le Liban, ce qui est en quelque sorte une reconnaissance de la pleine souveraineté du Liban, chose que Damas n'avait jamais accepté de faire depuis son indépendance totale de la France en 1946. Or, l'établissement des représentations diplomatiques ne peut en aucun cas à lui seul être suffisant pour faire confiance à l'actuel régime syrien. À cela s'ajoute l'alliance entre Téhéran et Damas qui rend les choses encore plus compliquées non seulement pour Israël mais surtout pour l'Occident en général et les États-Unis en particulier. En effet, dans un scénario de guerre contre l'Iran, quel serait le rôle de Damas, sachant que les armes qui parviennent au quotidien au Hezbollah transitent par le territoire syrien ? Est-ce que Damas se risquerait contre le Hezbollah pour le miner de l'intérieur et l'affaiblir quitte à gagner la confiance de l'Occident ? Qui de ses alliés au sein du nouveau gouvernement libanais, lesquels disposent d'un droit de veto capable de bloquer à tout moment les institutions du pays ? Et le dossier irakien dans tout cela et l'interférence de Damas qui envoi des combattants islamistes pour défier les Américains et contribuer avec l'Iran par islamistes interposés à miner la stabilité de ce pays ?

Entre craintes et espoir

Les réponses ne peuvent guère être rassurantes peu importe les stratégies verbales déployées à cet effet par le Président syrien à Paris. Seul un changement drastique de 180 degrés de la politique syrienne pourrait aboutir à une paix véritable dans la région. En d'autres termes, cela équivaudrait à la fin du régime syrien actuel. Or, avec l'impossibilité pour l'Occident de trouver une alternative à ce gouvernement et avec le grand échec américain en Irak, l'Occident et notamment Washington et Paris, risqueront-ils de déstabiliser la Syrie et aboutir à un scénario catastrophe similaire à celui de l'Irak qui engloberait le Liban et Israël ? Tout tend à croire que si la Syrie avance des signes encourageants, c'est davantage pour justifier une position occidentale pour entamer un semblant de reconnaissance d'une Syrie sur un fond de branle-bas de combat en gestation contre l'Iran. La paix semblerait alors plus fragile que jamais !

Alain-Michel Ayache,

spécialiste du Proche et Moyen-Orient

Département de Science politique

Université du Québec à Montréal (UQÀM)

Illustration(s) :

AP
Le président syrien, Bachar al-Assad rencontrait le 12 juillet dernier le président français, Nicolas Sarkozy.

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Numéro de document : news·20080719·LT·0064