Wednesday, December 31, 2008

Des mauvaises stratégies du Hamas aux leçons apprises par Israël

Cyberpresse

Mercredi 31 décembre 2008
LE SOLEIL - Point de vue

Des mauvaises stratégies du Hamas
aux leçons apprises par Israël

Rien ne va plus… au Proche-Orient! À quelques jours de l’inauguration de la nouvelle Administration américaine, les principaux acteurs arabes semblaient dans l’attente d’un signe en provenance de Washington pour ajuster leur « tirs » en adoptant des nouvelles mesures plus souples ou plus dures! Or, voilà que le camp des durs semble avoir pris de l’avance sur le camp de la paix en créant une crise sans précédent dans la Bande de Gaza.

En effet, après six mois de calme relatif dû à une trêve entre le Hamas et l’État hébreu, la situation explose de plus belle brisant avec elle une entrée « obamayenne » calme. C’est principalement le discours officiel des dirigeants du Hamas annonçant la fin de la trêve avec Israël qui est la source première de cette crise. La première salve de roquettes Al-Qassam et de Katioucha étaient l’étincelle qui a mis le feu à la poudre. Cette explosion de la violence n’est pas innocente dans le sens qu’elle réponde à une stratégie presqu’annoncée de part comme de l’autre.

Les enjeux pour le Hamas

En effet, pour le Hamas, il s’agit avant tout de miser sur une similarité du résultat obtenue par le Hezbollah qui avait fait face à l’armée israélienne en 2006 au Liban. Une action, faut-il le rappeler, qui a été lancée par le mouvement chiite libanais principalement pour soulager le Hamas aux prises avec la pression de Tsahal pour libérer le soldat Guilad Chalit. La confrontation alors avait duré 33 jours et abouti en fin de compte à une victoire médiatique sans précédent du Hezbollah qui a réussi « une victoire divine » comme l’avait annoncé son chef, Sayyed Hassan Nasrallah. Un discours qui a transcendé la frontière libanaise pour envahir l’ensemble de la rue arabe mettant ainsi dans l’embarras nombre des régimes de ces pays.

Ainsi, le Hamas, chercherait à créer des conditions similaires, quitte à provoquer une réaction en chaîne dans la rue arabe, qui, à son tour, exercerait des pressions sur leurs régimes respectifs. Cela se traduirait par une mobilisation de ces derniers contre la nouvelle administration américaine déjà condamnée d’avance. Cela s’explique principalement par la déception affichée des leaders arabes après la nomination de Rahm Emanuel comme chef de Cabinet du futur Président Barak Obama! Le mythe du Président « musulman » américain et ami de la cause arabe était alors tombé en flèche.

La stratégie du Hamas serait alors celle de causer une instabilité continue en territoire israélien comme il avait l’habitude de faire en attendant de mieux comprendre et analyser la politique de l’équipe Obama une fois au pouvoir. Or, ce que le Hamas a manqué d’analyser, c’est avant tout l’espace temps qu’il a choisi pour appliquer sa stratégie et qui ne convient plus à Tel-Aviv.

Les enjeux israéliens

En effet, Israël a appris la leçon de la guerre de juillet 2006 et cherche à réparer cette erreur qui lui a coûté son image de dissuasion dans la rue arabe, surtout dans un temps où l’Iran se fait de plus en plus menaçant pour les intérêts aussi bien américains qu’israéliens dans la région.

Ainsi, le mythe brisé en 2006 par les images de tanks ultrasophistiqués détruits par un armement soviétique dernier cri et iranien utilisé par les miliciens du Hezbollah devait être changé car il y va de la survie de l’État d’Israël. Cela est d’autant plus vrai que les attaques du Hamas utilisant des roquettes artisanales Al-Qassam se transformaient chaque jour en des attaques utilisant un armement de plus en plus sophistiqué de fabrication étrangère! Des munitions, des mortiers, des missiles Katioucha de fabrication soviétique se mêlaient à des vivres et transitaient par les tunnels creusés par les combattants du Hamas entre l’Égypte et Gaza.

Cette situation ne pouvait durer plus longtemps car chaque jour le nombre de victimes civiles israéliennes augmentait au même rythme que les roquettes et mortiers du Hamas! À cela s’ajoute la détermination du gouvernement actuel de démontrer qu’il est encore capable de gérer une crise et diriger une guerre similaire dans certains aspects à celle de 2006 sans pour autant y laisser des plumes.

C’est ainsi que la stratégie israélienne basée sur une préparation préemptive enrichie de l’expérience libanaise, menée à l’époque d’une façon spontanée et presque chevaleresque, a poussé l’armée israélienne à considérer des mesures qui lui ont permis de lancer aussitôt les premiers missiles palestiniens se sont abattus sur les villes israéliennes une attaque à grande échelle visant les centres et quartiers généraux du Hamas.

2006 – 2008, la différence dans l’action!

Aujourd’hui, cette tactique et stratégie israélienne ressemble presque comme deux gouttes d’eau à la stratégie adoptée durant la Seconde guerre du Liban contre le Hezbollah, mais avec deux différences majeures. La première se situe au niveau de la préparation de l’armée israélienne qui était prête à l’action aussitôt l’ordre lui a été intimé. Son attaque tous azimut a ciblé l’ensemble des régions où se situait le Hamas, alors que dans le cas du Hezbollah, cela s’était fait par étape, ce qui a permis aux dirigeants du parti chiite pro-iranien de se terrer. La seconde, c’est la préparation pour une invasion terrestre de grande envergure pour déloger le restants des miliciens du Hamas et qui semble être mis en marche. Ce qui n’était pas le cas au Liban puisque c’était uniquement des réservistes mal équipés qui avaient mené la première attaque contre le Hezbollah. Alors que dans le cas du Hamas, les réservistes viendraient appuyer les troupes d’élites et leur nombre se compte par milliers!

Le but ultime

Cette dernière crise, ouvre grand la boîte de pandore car le Hezbollah, l’Iran et la Syrie peuvent orchestrer de nouvelles stratégies avec l’appui d’une opinion publique arabe en furie contre Israël et les États-Unis. La région en entier peut écoper et dégénérer en une guerre régionale, à moins que ces acteurs arabes ne soient approchés par Washington, Moscou ou d’autres puissances pour les ramener à reconsidérer leurs positions d’une part comme de l’autre.

En attendant, ce qui se joue actuellement, c’est l’avenir du Hamas et la possibilité réelle pour Mahmoud Abbass de refaire son entrée dans Gaza, quitte à reprendre le dialogue plus tard avec Israël pour espérer enfin avancer les pourparlers de paix. Si tel serait le cas, cette attaque servirait également d’un message aussi bien à l’Iran qu’au Hezbollah dans un temps où Damas semble avoir brisé la glace avec Tel-Aviv!

Alain-Michel Ayache
Spécialiste du Proche et Moyen-Orient
Département de Science politique
Université du Québec à Montréal (UQÀM)
Concordia University

Saturday, December 6, 2008

L'avocat du «Diable»


L'avocat du «Diable»
Alain-Michel Ayache

Après Maher Arar, c’est au tour de trois autres musulmans… canadiens, Ahmad el-Maati, Muayyed Nureddin et Abdullah Almalki de réclamer des dommages et intérêts au gouvernement du Canada pour des crimes commis contre leurs personnes par des pays dont ils sont originaires, tel la Syrie et l’Égypte. Ce qui est regrettable, c’est que le contribuable canadien se voit désormais obligé de payer la facture à la place des dictatures du Proche et du Moyen-Orient, tout cela à cause d’un précédent créé par l’affaire Arar!

En effet, la décision du gouvernement canadien de payer des dommages et intérêts à Maher Arar pour avoir été « torturé » par les services de renseignements syriens, à cause de « fausses informations » adressées par la GRC et par le SCRS aux autorités américaines, n’a fait qu’ouvrir une boîte de pandore pour ce genre de situation. Le problème ne réside pas dans la volonté du gouvernement d’apporter une certaine aide à ces « victimes », mais surtout dans la façon dont le système aborde lesdits problèmes.

Ce qu’il faut savoir

D’ailleurs, aussi polémique que ce qui suit sera, la vérité reste toujours vague, compte tenue des informations qui circulent dans le milieu arabe à Montréal. Je m’explique :

Selon des observateurs de la scène politique arabe, et non des moindres, qui habitent la France et qui sont de fins critiques du gouvernement syrien, M. Arar serait membre des Frères musulmans. Or, ces derniers sont bannis par les autorités syriennes contrôlées par une minorité alaouite (secte issue du chiisme) à laquelle appartient l’actuel président syrien, Bachar Assad. Le père de ce dernier avait détruit deux villes en 1982, Hama et Homs, par l’aviation syrienne et causé plusieurs dizaines de milliers de morts, ceci pour mettre fin aux actions et aux tentatives de putsch que les Frères musulmans (sunnites) fomentaient contre lui et son régime dirigé par une main de fer alaouite.

Depuis l’invasion de l’Irak par les Américains, mais surtout depuis l’évacuation humiliante des troupes d’occupation syriennes du Liban sous le poids de la colère populaire libanaise, de même que dans le cadre d’un jeu de passe-passe pour gagner les faveurs américaines ou pour monnayer quelques stratégies régionales, le régime Assad (fils) multiplie les efforts de déstabilisation de la rue arabe, notamment l’irakienne. Sa méthode la plus rusée consiste à encourager les combattants sunnites des Frères musulmans et ceux d’Al-Qaïda à partir se battre en Irak contre les alliés (notamment les Américains), plutôt que de diriger leurs attaques contre le régime des Assad. Car il faut comprendre que la majorité en Syrie est sunnite et non alaouite. La dernière ne représente que 5% de la population syrienne ; pourtant, ce sont les sbires d’Assad qui, depuis plus de 40 ans, dirigent le pays d’une main de fer !

Le résultat d’un tel machiavélisme est, bien entendu, l’affrontement politique avec Washington. Or, depuis que l’Iran occupe de plus en plus de place sur la scène régionale, Damas multiplie les tractations pour regagner sa place de joueur principal dans la région, notamment suite à la dislocation du régime-frère baassiste de Saddam Hussein.

Comment s’y prendre?

La méthode la plus intéressante que Damas a trouvée consiste avant tout à continuer de jouer les uns contre les autres et de se positionner comme intermédiaire ou comme pourvoyeur de solutions. C’est dans cette optique qu’il faut analyser l’affaire Arar. En effet, selon les observateurs du monde arabe en question, Arar fait partie des Frères musulmans. Or, ce sont ces mêmes Frères musulmans qui envoient leurs Jihadistes se faire exploser en Irak contre les Américains et leurs alliés irakiens et occidentaux. De plus, il semblerait que des proches d’Arar cherchent à vendre la mèche selon laquelle il se serait réellement déplacé en Afghanistan pour des raisons louches. Le problème, c’est que ces derniers refuseraient de parler tant qu’une bonne somme d’argent ne leur aurait été pas versée !

En d’autres termes, et sans vouloir accuser M. Arar de quoi que ce soit, le geste du gouvernement fédéral de payer une personne pour des erreurs commises par un autre pays a ouvert la porte à d’autres demandes similaires. Car la GRC et le SCRS n’avaient pas de fausses informations en tant que tel, puisque les Frères musulmans sont bel et biens un groupement de fanatiques musulmans et recrutent des Jihadistes pour se battre contre l’Occident. Si l’on part du principe que l’information qui leur a été transmise et selon laquelle M. Arar appartenait aux Frères musulmans, donc, et conformément à la Convention de sécurité signée entre le Canada et les USA après les événements du 11 septembre 2001, les institutions de sécurité du Canada n’ont pas commis d’erreur ! Si erreur il y eut, c’était davantage celle des États-Unis d’Amérique, car M. Arar aurait dû être renvoyé au Canada, qui est officiellement son pays, plutôt qu’en Syrie. D’où la question principale : À qui a servi le « crime » ?

Un précédent dangereux

Ainsi, le dédommagement financier de M. Arar, bien qu’il soit humainement justifiable pour certains, procure des munitions à tous ceux qui voudraient réclamer des sommes d’argent du gouvernement fédéral en tant que dédommagement pour avoir subi des préjudices dans leurs pays d’origine ! En quelque sorte, voici une sorte d’une loterie inespérée qui est mise à la disposition des plus zélés ! Or, ceci n’est qu’une preuve concrète de la faiblesse de nos institutions, qui se laissent intimider par des personnes qui profitent largement du système.

Ce dont le Canada a besoin, c’est de répondre rapidement aux appels de ses citoyens en détresse dans leurs pays d’origine. Selon les lois de ces pays, souvent dirigés par des dictateurs sanguinaires assoiffés de pouvoir et d’argent, toute personne née ou de descendance de parents originaires du pays en question, (ex. Syrie, Égypte, etc.), est considérée « native » du pays dès lors qu’elle se trouve sur son territoire. La nationalité canadienne ne sert alors à rien et n’accorde aucun privilège à son détenteur. D’ailleurs, de nombreux cas similaires ont déjà été signalés dans plusieurs pays, où le passeport canadien n’a pas servi à grand chose d’autre qu’à être encore plus torturé et accusé d’espionnage pour le compte des … Américains ou des Israéliens.

Aujourd’hui, nous voilà donc, encore une fois, aux prises avec trois nouvelles personnes qui défient le gouvernement et lui demandent réparation pour des crimes commis par d’autres pays. Pour peu, l’on va finir par croire que les services de sécurité canadiens ne servent plus à rien autre que de diffuser des mensonges et de provoquer la torture par régimes interposés !

Malheureusement, une telle politique de « naïveté » peut entraîner des conséquences néfastes sur nos services, à une époque où le terrorisme est dormant à l’intérieur de nos frontières et n’attend que le bon moment, celui de la faiblesse de nos institutions, pour activer ses cellules.

Faut-il vraiment, au nom de l’humanitarisme, être laxiste au point de laisser des zélés usurper le système ? Faudrait-il purger nos institutions de sécurité pour les rendre plus efficaces et capables de mieux cerner le vrai du faux ? Sommes-nous devenus peureux au point de nous priver de dire les choses comme elles sont, sans crainte de provoquer un soulèvement des médias au nom des « droits de la personne » ? Or, ce sur dernier point précisément, je crains que cela ne soit déjà peine perdue car, à y regarder de plus près, on peut sérieusement se demander quand s’imposera les changements à la Constitution canadienne afin qu’elle devienne plus appropriée aux détracteurs de notre société. Seul une politique « clairvoyante », efficace et rigoureuse pourrait stabiliser et remettre sur pieds nos institutions de sécurité. C’est justement là tout le défi du nouveau ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan.