Il y a des jours où je me demande si l'Occident est conscient de sa naïveté et prisonnier
de sa démocratie et ses valeurs... et puis je me dis que c'est peut-être sa
façon de défendre nos valeurs de liberté... mais à quel prix?
La tragédie des Émigrants et
réfugiés syriens -- entre autres -- nous donne finalement l'occasion, et ce,
bien très tard -- mais comme dit l'adage: « mieux vaut tard que jamais » -- de
réaliser que sans aider à trouver la solution dans les pays du tiers-monde,
leurs problèmes finiront par nous rattraper d'une manière ou d'une autre et
souvent, c'est le contribuable occidental qui paye les pots cassés des
politiques de ses gouvernements qui fragilisent en fin de compte nos valeurs.
Pas d'alternative viable
Loin d'être un fan du
dictateur syrien, il n'en demeure pas moins que sa disparition en ces moments
rendront la situation au Proche et Moyen-Orient encore plus volatile et
facilement exportable vers l'Ouest. Rappelez-vous ce que feu Kadhafi disait de
son vivant, que l'Occident finira par perdre devant la démographie musulmane.
Là encore, il ne s'agit pas non plus de créditer cette thèse aveuglément ou de
clouer au pilori l'Islam car souvent il y a de nombreux musulmans qui ont
contribué et d'une manière très honorable à bâtir la renommée de nombreux pays
occidentaux dans plus d'un domaine.
Sauf qu'il faut être réaliste
et conscient du danger de ne pas connaître à qui on a véritablement à faire.
Oui, l'Islamisme pur et dur ou le fondamentalisme souvent associé au wahhabisme
et au salafisme ne peut en aucun cas être compatible avec nos valeurs
occidentales et pourtant me diriez-vous que les princes saoudiens et qataris
sont éduqués en Occident et importent nos valeurs chez eux... Certes, c'est
vrai en partie, mais cette importation vise les familles royales et princières
alors que le peuple ou le commun des mortels reste plongé dans l'ignorance. Or,
le problème n'est pas ici, car nul gouvernement occidental n'ignore cette
vérité. Pire, les dictateurs d'autant que la soi-disant révolution arabe financée et encouragée par le Qatar, mieux
connue sous le surnom de « printemps arabe » avaient été pour longtemps les
chouchous de l'Occident et leurs alliés objectifs dans la mesure où les
richesses naturelles et notamment pétrolières de ces derniers servaient l'Occident. Des richesses dont les retombées atterrissaient dans les poches des
princes et des gouverneurs alors que le commun des mortels était souvent réduit
à la mendicité. Cela était également vrai pour le régime syrien qui, pour des
nombreuses années, était le partenaire pragmatique de Washington dans le
maintien du calme sur la frontière nord d'Israël alors qu'au même moment, les États-Unis et l'Occident dans son ensemble étaient au courant des
exactions du régimes contre son peuple mais également contre les pays voisins
notamment le Liban. Mais la realpolitik étant ce qu'elle est, le régime des
Assad perdura. Pendant tout ce temps, les opposants pouvant former un
gouvernement en exil étaient soit réduits au silence par le régime, soit complètement
ignorés par l'Occident, jusqu'au jour où tout d'un coup l'Occident s'est rendu
compte qu'il fallait une alternative au régime des Assad... Le problème, qui est
toujours d'actualité, c'est qu'il n'y en a plus! Et voilà que « l'opposition » principalement sunnite de l'armée libre de Syrie essaye de prendre la relève
aidée tout d'abord par des opposants sunnites irakiens. Rapidement, elle se
trouve aux prises avec un problème nouveau, la naissance de plusieurs groupes
fondamentalistes wahhabites, salafistes et takfiristes cherchant à instaurer un
Califat islamique entre l'Irak et la Syrie sans égard à la cause juste de remplacer
le dictateur de Damas. Or, le résultat fut autre. Voilà maintenant que les
fondamentalistes principalement sous le commandement de ce qui est appelé État
Islamique au Levant (EIL) ou DAECH en arabe, ouvre une boîte de pandore très
dangereuse pour le monde entier.
Le jeu mesquin des
monarchies du Golfe
Armé et financé par le Qatar
et l'Arabie Saoudite pour renverser le régime syrien l'EIL est également
mandaté de s'opposer à l'avancée de l'Iran et de son allié le Hezbollah
libanais en Syrie mais aussi dans certains pays du Golfe où vit une minorité
(dans certains cas représentant la majorité dans une région donnée) de Chiites.
Les pays du Golfe ont une réelle peur
que ces derniers ne se révoltent et changent la donne dans leurs pays, comme ce
fut le cas au Bahrein ou comme c'est toujours le cas au Yemen. Or, l'EIL s'est
taillé une place à part et a pris pour cible tout ce qui n'était pas allié à sa
vision du monde, réductrice, destructrice ramenant les peuples à l'âge de
pierre ou presque.
Qu'on aime ou que l'on n'aime
pas Assad, il n'en demeure pas moins que l'EIL ne peut être le régime de
remplacement. Assad n'a pas détruit le patrimoine mondial, l'EIL l'a fait.
Assad n'a pas massacré ses minorités, l'EIL l'a fait. Assad n'a pas délogé
femmes et enfants de leurs maisons, l'EIL l'a fait. Certes, Hafez al-Assad,
père de l'actuel président, a commis de nombreuses atrocités contre les
Sunnites en Syrie dans les années 80 et contre les Chrétiens et Chiites et même
contre les Palestiniens au Liban, mais cela s'est déroulé sous une sorte de
bénédiction américaine et occidentale. Assad semble avoir utilisé les armes
chimiques contre les Sunnites, mais l'EIL l'a également fait contre les
innocents. Assad utilise les barils explosifs, l'EIL coupe les têtes en fait
des productions « EILienne » pour faire peur aussi bien aux réticents musulmans
et aux Occidentaux mais aussi est passé maître dans la propagande et le
recrutement parmi nos jeunes partout en Occident! Et nous... nous observons
bouche bée! Qui choisir entre le pire ou le moins pire? Or, la question n'est
plus à ce stade!
Aujourd'hui, le danger réside
dans la perspective d'absence totale de solution pour trouver un substitut à
Assad en Syrie à un moment où Vladimir Puttin cherche par tous les moyens non à
sauvegarder Assad puisqu'il le préfère sur d'autres, mais sauvegarder l'unique
place stratégique restante pour la Russie au Proche et Moyen-Orient en Syrie où
une base navale russe se trouve depuis quelques années à Tartouse sur la côte
syrienne encore sous contrôle du régime.
La meilleure façon
d'aider les réfugiés
Et les réfugiés? Il faut sans
aucun doute compatir avec les réfugiés, mais il faut le faire chez eux et non
pas les emmener en grands nombres ici. Il faut comprendre que les populations
sunnites de ces pays sont restées traditionnelles et pauvres sous les Assad et
l'EIL a recruté ses jeunes et continu de le faire. Les emmener en Occident
créera un choc sérieux de civilisation dans la mesure où nos valeurs sont loin
d'être compatibles avec l'Islam traditionnel. Il suffit de regarder le phénomène
en France et l'incapacité de la France à intégrer ses immigrants alors qui
étaient principalement venus pour aider à développer la croissance économique
dans les années soixante et souvent ses immigrants musulmans s'étaient pourtant
battus pour la France. Les descendants des Harkis, n'ont malheureusement pas
réussi à s'y intégrer car rejetés par la population française qui les
considérait comme immigrants et eux nés en France ne se considérant pas
Français.
Il faut aider les réfugiés
syriens dans un environnement qui les convient plus, en Turquie, au Liban et en
Jordanie où ils se trouvent par millions. Les aider commence par créer des
écoles pour permettre à ces jeunes de continuer leur éducation au lieu de faire
d'eux des futures bombes humaines. Et puis, pourquoi ne pas obliger les pays
arabes, tels l'Arabie Saoudite, le Qatar, les Émirats Arabes
Unis et le Bahreïn à les accueillir? Aucun de ces pays ne participe réellement
dans cet effort mais sont contents d'exporter les réfugiés et même parfois de
payer pour eux pour se déplacer en Occident... pourquoi? Quel plan derrière
cela? Ils sont pourtant de la même religion et leurs pays sont vastes et ils
ont les moyens... pourquoi alors ne pas les aider en les accueillant tout près
de chez eux? Puis le moment venu, une fois la solution à la crise syrienne
trouvée, ils pourront retourner plus facilement chez eux? Par ailleurs, où sont
passées les voix modérés des musulmans sunnites pour condamner les exactions de
l'EIL contre principalement des musulmans?
Niqab ou valeurs
démocratiques, il faut choisir
Pourquoi alors chercher à
importer des graines d'une intégration difficile dans nos pays? Avons-nous la
capacité de les pousser à adopter nos valeurs? Accepteraient-ils de délaisser
les leurs qui ne sont pas tout-à-fait compatibles avec les nôtres? À un moment
où l'histoire du Niqab ressurgit de nouveau, il est important de prendre cette
question au sérieux car cela ne représente qu'un test ultime pour nos
démocratie et nos valeurs. Saviez-vous qu'il est interdit de couvrir son visage
sur les papiers officiels dans les pays les plus fondamentalistes? Et qui
prends les photos dans ces pays pour les passeports? Certainement pas des
femmes en burqa! Alors soyons un peu réaliste et laissons notre naïveté
d'occidental de côté. Cette question n'a rien à faire avec la religion. Il
s'agit avant tout d'un acte purement politique contre les valeurs occidentales.
Alors pensons à défendre nos valeurs.
Alain-Michel Ayache
Spécialiste du Proche et Moyen-Orient
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