Wednesday, July 25, 2012

Entre multiculturalisme et intégration: Les communautés culturelles à l'aube des élections


Entre multiculturalisme et intégration :
Les communautés culturelles à l’aube des élections

Pourquoi les communautés culturelles bouderaient-elles les prochaines élections ou au contraire participeraient-elles en masse? C’est cette question qui ne cesse de circuler dans les milieux politiques depuis qu’une troisième voie s’est présentée aux électeurs québécois, entendez par cela la Coalition Avenir Québec.
Avant la naissance de la CAQ, les communautés culturelles ou les « néo-Québécois » étaient limités à deux choix : soit l’indépendance du Québec avec le PQ -- alors qu’eux sont venus au « Canada » -- soit le Parti Libéral, souvent vu comme étant un parti du statu quo pour un Québec au sein du Canada, bien que le PLQ soit également perçu comme profitant du choix obligé desdites communautés et de leur vote acquis d’avance par défaut!
La CAQ : Une fausse troisième voie?
L’avenue de la CAQ se présentait alors comme une troisième voie, une alternative unique au Parti Libéral, donc un parti fédéraliste qui ne prône pas la séparation, du moins ce que les Caquistes tentent tant bien que mal à faire circuler dans les milieux communautaires. Or, le fait que le Chef de ce parti provienne du PQ et nombre de ses députés aussi, mine la crédibilité de son agenda officiellement annoncé.
Pour plusieurs analystes issues desdites communautés, rien n’empêche M. Legault dans dix ans de changer de stratégie et de cap, ou d’utiliser les acquis durant ces dix années pour relancer un référendum sur la souveraineté du Québec. En d’autres termes, il utiliserait les dix années en question pour bâtir ses forces et son parti avec l’aide des Québécois y compris les communautés culturelles en miroitant un Québec fort au sein de la confédération canadienne avant de sortir de sa manche à la dixième année le joker de l’indépendance. Il serait alors trop tard pour les véritables fédéralistes de faire opposition à son projet.
Et, toujours selon ces analystes, ce seraient justement les communautés culturelles qui seraient les premiers à payer le prix de l’ignorance du l’agenda réel du Chef.
Mais que veulent-elles ces communautés culturelles me diriez-vous?
La problématique de l’intégration
Simple : la reconnaissance des autres membres de la société québécoise. En fait, à mieux regarder les choses, aucun gouvernement québécois à date n’a mis en place une réelle politique d’intégration desdites communautés. Au lieu, on a laissé ce privilège au fédéral qui prône depuis des années le multiculturalisme. Est-ce la bonne recette pour le Québec?
Le constat aujourd’hui tient à indiquer que les choix des différents gouvernements québécois à date ont privilégié la langue française sur un ensemble d’autres variables qui n’avaient pas été prises en considération et qui désormais soulèvent une problématique certaine.
En effet, s’il y a une société généreuse et accueillante, c’est bel et bien la communauté québécoise. Sauf que le problème n’est pas le fait d’accueillir les nouveaux venus. C’est plus leur intégration qui cause problème et qui poussent certains décideurs de parler d’accommodements raisonnables, ce qui représenteraient dans l’avenir une boîte de pandore pour de nombreuses raisons, dont la principale demeure la sauvegarde des valeurs québécoises.
Force est alors de constater que la politique multiculturelle québécoise est plus un échec bien que de nombreux immigrants devenus québécois aient brillé par leur succès et porté haut le flambeau culturel et économique/affaires québécois, tels Wajdi Mouawad, Dany Laférrière et Jamil Cheaïb le parton du Groupe Adonis, et j’en passe.
Il y a les « autres » et les Québécois
Le problème que rencontrent les membres des communautés culturelles, c’est principalement le fait qu’ils sont perçus toujours comme les « autres » au Québec. On a beau être au Québec depuis des dizaines d’années, étudié ici, travaillé, payé des impôts, marié et eu des enfants, on est toujours perçu comme Algérien, Marocain, Libanais, Italien, Juif, etc. Souvent, me dit-on dans ces milieux, la première question qu’on nous pose quand ils entendent notre accent, c’est : vous êtes quoi / d’où venez-vous? Quelle est votre nationalité? -- "Alors que nous sommes tous citoyens Canadiens, me précisent-ils, avant d'ajouter "théoriquement" -- mais la plupart de ces derniers vivant au Québec veulent tout simplement être perçus comme Québécois!
Par ailleurs, et j’en ai rencontré des cas, tout au long de ma carrière professionnelle ici. Le premier problème traité hypocritement par les différents gouvernements qui se sont succédés au Québec depuis que les portes de l’immigration autre qu’européenne ont été ouvertes, c’est l’équivalence des diplômes. « On nous a promis mondes et merveilles au Québec, et lorsque nous sommes venus, nos diplômes n’ont pas été reconnus. Nous n’avons pas pu donc intégrer le marcher du travail et nous nous sommes retrouvés sur le bien-être social »; d’autres diront « J’ai adressé des centaines de CV pour des postes similaires à ceux dans lesquels je travaillais dans mon pays d’origine, et y compris d’autres juniors, car je voulais à tout prix travailler pour faire vivre ma famille, mais je n’ai jamais eu de réponse. Le jour où j’ai changé de nom sur mon CV et l’ai francisé pour ressembler à Tremblay, j’ai eu des réponses »! Voici également un autre problème dont les mentalités ne sont pas encore prêtes à résoudre.
Devant cette inertie d’intégration, les communautés se regroupent et commencent à former ce qui ressemble chaque jour un peu plus à des ghettos qui risquent un jour d’exploser à la parisienne si des politiques adéquates ne sont pas mise de l’avant.
Respectés pour ce qu’ils sont et non pour qui ils sont!
Pis encore, avec la campagne électorale, tous les partis politiques se ruent aux portes de ces communautés pour solliciter leur vote. Une visite qui se produit uniquement en temps d’élection et disparaît aussitôt les élections terminées.
Ce qui enfonce le clou de la méprise encore plus, c’est le fait d’accepter les candidatures de personnes issues desdites communautés et qui ne représentent aucunement leurs propres communautés bien qu’elles clament l’opposé. Le danger dans cela, c’est l’image que les partis politiques qui acceptent lesdits candidats donnent d’eux aux restants des communautés concernées. Car souvent, les personnes qui se présentent aux élections ont les moyens pour le faire. Or ce que le monde politique au Québec -- et ailleurs -- devrait comprendre, c’est que les communautés culturelles qui ont choisi le Canada pour y vivre partent du principe qu’elles sont venues ici pour échapper justement à ce qui se passait dans leur pays d’origine où seuls les plus aisés ou proches des partis politiques au pouvoir pouvaient aspirer à se présenter aux élections alors que les plus éduqués et capables d’apporter un réel changement aux politiques néfastes des gouvernements de leurs pays ont été forcés de quitter leur pays pour trouver de meilleures opportunités ailleurs, où, leur a-t’on-dit, elles seront respectées pour ce qu’elles sont et non pour qui elles sont!
En effet, et à regarder de plus prés, depuis des années, la grande majorité des candidats aux élections, issue des communautés culturelles, qui porte le flambeau des différents partis n’a jamais eu l’appui des siens, soit parce que ces derniers ne les reconnaissent pas comme représentatifs de leurs intérêts, soit parce qu’ils ne croient pas au parti avec lequel lesdits candidats se sont présentés et ont opté pour le parti le plus « sûr » le PLQ.
Or, à mieux analyser les circonscriptions dans lesquelles lesdits candidats sont nommés, on perçoit rapidement qu’ils sont condamnés d’avance, car à part une chance inouïe, tel un raz-de-marée à la NPD, ces candidats ne passeront jamais. D’où la question : pourquoi les nomme-t-on? Or, la réponse semble être la plus simple, pour recueillir des fonds afin de remplir les caisses des partis.
Certes il y a des exceptions tels par exemple le cas du Ministre Sam Hamad, ou Yolande James ou même à Québec Solidaire avec le Dr Amir Kadir, mais ces derniers s’étaient présentés dans des comtés sûrs, acquis presque d’avance, ce qui n’est pas le cas des autres.
Des candidats « poteaux » sans réel charisme ni connaissance des problématiques québécoises
Par ailleurs, et pour considérer ces candidats « poteaux » et à mieux analyser leur savoir-faire politique l’on se pose alors de sérieuses questions sur l’agenda du parti qui les nomme. En effet, certains candidats sont appuyés par des organisations qui laissent à désirer ou par des antennes de partis politiques étrangers ou par des groupes de pressions particuliers avec un agenda qui ne rencontre pas nécessairement les politiques québécoise et canadienne. Ce qui pousse à la question suivante : et si ces derniers arrivaient à gagner par un raz-de-marée leur siège à l’Assemblée nationale, vers qui se tournerait leur allégeance? Vers le Québec ou l’étranger qui les a subventionnés ou aidés? Ne serait-ce pas de l’interventionnisme étranger dans les affaires nationales du Québec?
Pis encore, si nous plaçons ces candidats sur un panel sans qu’ils aient quelqu’un de leur parti derrière eux pour leur écrire leurs discours, ou pour leur dire comment s’exprimer, mieux, quel message véhiculé, que connaissent-ils de la réalité québécoise et que peuvent-ils apporter comme solution concrète à la société québécoise?
La réponse à cette question est aussi simple que compliquée, car elle implique une vision double du candidat : celle d’un bouche-trou pour un comté perdant, mais aussi celle d’un collecteur de fonds. Quid alors de son intégration? Et si le fait de participer comme « poteau » aux élections était un début d’intégration?
C’est justement là où le bas blesse, car les communautés culturelles ont fini par percevoir et comprendre cette réalité. Elles ne veulent plus être considérées comme des bouche-trous, mais comme partie intégrante de la société à laquelle elles contribuent depuis des années sans rien demander en retour. Or, avec la montée des problèmes ethniques à l’étranger et le risque de dérapage ici au Québec, notamment à cause de cette politique de multiculturalisme qui tend à pousser les gens à vivre les uns à côté des autres au lieu de les pousser à vivre les uns avec les autres, le spectre d’une crise de la banlieue parisienne pourrait bien un jour se dérouler ici-même, au Québec, si les gouvernements québécois, quel que soit le parti au pouvoir, n’instaurent pas dans les plus brefs délais une politique de véritable intégration des nouveaux venus pour enfin créer de nouveaux contributeurs, au vrai sens du terme, à la société québécoise et non plus de nouveaux pauvres… sur le BS.
Par ailleurs, et loin de vouloir justifier les écris des uns et les décisions des autres, sans une prise de conscience du rôle qui peut être d’une importance majeure pour le développement du Québec et le maintien de la paix sociale, les communautés culturelles peuvent avoir le dernier mot dans les prochaines élections pour faire pencher la balance d’un côté comme dans l’autre surtout sur l’île de Montréal où leur présence est estimée à plus de 35% et dans de nombreux autres comtés à travers le pays.
C’est à partir de ce prisme qu’il faut alors analyser la sortie injustifiée du candidat de la CAQ démis depuis, tout en gardant en tête que les communautés culturelles n’ont toujours pas oublié la fameuse phrase de l’ex-Premier ministre du Québec M. Jacques Parizeau, mettant la cause de l’échec du référendum sur le dos des immigrants. Cela avait conduit ces derniers à dresser en majorité un mur de méfiance vis-à-vis du Parti Québécois. Or, cette méfiance n’est pas à sens unique, ce qui complique encore plus la donne aux communautés et aux Québécois « de souche » en général, poussant parfois à un paroxysme dans l’exagération.

Alain-Michel Ayache
Analyste politique
Spécialiste du Proche et Moyen-Orient

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